Être fleur …

 » Jour après jour

Essayez d’être fleur,

D’être comme elle

Pleine du toucher

De l’immédiat,

Porteur d’un vent de lumière.

Au milieu des autres passants,

Être fleur

Contre la menace.  » Eugène GUILLEVIC (Poète français)

Illustration de l’artiste coréenne :  MI -KYUNG CHOI

Les lilas …

 » J’avais été cueillir des gerbes de lilas,
J’en faisais des bouquets presque devant ta porte,
Tout le beau jour vécu s’épanchait de mes bras,
Une ivresse sortait, lourde, poignante et forte
De ces lilas pesants qui respiraient tout bas.

Je chantais à mi-voix… me berçant de ce leurre
De la chanson jetée à travers le chagrin,
Les arômes fervents montaient vers ta demeure,
Et mon désir de toi que j’exhalais sans fin
Mettait un souffle d’or dans la tiédeur de l’heure.

Tes pas fermes et doux, tout à coup, s’annonçaient
Tu passas… Je me tus… L’âme, à tes pieds, fauchée
J’écoutai, les yeux clos, tes pas qui décroissaient,
Je te suivis de toute mon ardeur cachée…
Oh! ce silence et les lilas qui l’emplissaient !… » Hélène SICARD (Poétesse française – Extrait de son recueil L’instant éternel/1907)

Et puis j’ai rencontré …

 » J’étais enfermée dans une coquille.
Je croyais que j’étais impuissante à changer ma vie.

Puis
j’ai rencontré
la profondeur de la mer,
la beauté du ciel,
la liberté des oiseaux,
la puissance du vent,
la légèreté des nuages,
la lumière du soleil,
et j’ai senti qui j’étais, que tout cela
était moi.

J’étais profonde comme la mer
belle comme le ciel,
libre comme les oiseaux,
puissante comme le vent,
légère comme les nuages,
lumière comme le soleil,

et alors j’ai choisi de redevenir ce que j’étais…  » Annie MARQUIER (Écrivain et conférencière canadienne – Extrait de son livre Le pouvoir de choisir)

La danse des fleurs …

 » C’est la danse des fleurs,
La danse des couleurs.
En été, au printemps,
Elles s’agitent gaiement
En prenant du bon temps.

Le prétentieux rosier
A ce soir invité
La jolie pâquerette
Qui d’un coup de baguette
S’est faite belle pour la fête.

Il y a aussi le lys,
Le hâbleur de service
Qui sait parler aux fleurs,
Leur donner du bonheur
Et transpercer leur cœur.

Le très coquet narcisse
Essaie des pas de danse ;
Il va trouver une glace
Pour admirer sa face
Et sa jolie prestance.

La timide violette
Qu’aucune fleur ne guette
Est restée dans son coin,
Minée par le chagrin
Qu’à elle on ne vienne point.

La petite pensée
S’est laissé entraîner
Par le très beau dalhia
Qui la prend dans ses bras
Et lui parle tout bas.

C’est la danse des fleurs,
La danse des couleurs.
En été, au printemps,
Dans leurs jolis vêtements,
Elles sont au firmament.

Soudain, les fleurs s’envolent,
Font une farandole ;
Les pétales se dispersent
Et retombent en averse
Sur le sol.  » Olivier BRIAT (Poète français)

Tableau de : Beatrice Emma PARSONS

L’oiseau et la fleur …

 » L’oiseau dit sa peine à la fleur qui sourit,
Et la fleur est de pourpre, et l’oiseau lui ressemble,
Et l’on ne sait pas trop, quand on les voit ensemble,
Si c’est la fleur qui chante, ou l’oiseau qui fleurit.

Et la fleur et l’oiseau sont nés à la même heure,
Et la même rosée avive chaque jour
Les deux époux vermeils, gonflés du même amour.
Mais quand la fleur est morte, il faut que l’oiseau meure.

Alors, sur ce rameau d’où son bonheur a fui,
On voit Pencher sa tête et se faner sa plume.
Et plus d’un jeune coeur, dont le désir s’allume,
Voudrait, aimé comme elle, expirer comme lui.

Et je tiens, quant à moi, ce récit qu’on ignore
D’un mandarin de Chine, au bouton de couleur.
La Chine est un vieux monde où l’on respecte encore
L’amour qui peut atteindre à l’âge d’une fleur.  » Vers extraits d’un poème de Louis BOUILHET ( Ex-interne en médecine devenu professeur de Lettres, poète français, très grand ami de Gustave Flaubert)

J’aime bien le mois de juin …

 » J’aime bien le mois de juin
C’est celui des cerises
Des longues journées sans fin
Aux douces soirées exquises
Très tôt dès le matin
Tous les oiseaux devisent
Et tard quand la nuit vient
Certains encore s’avisent
C’est temps des examens
Où les sérieux révisent
Et leurs moments malsains
Des attentes indécises
C’est tendres gazons coussins
Où la rosée irise
Les beaux serments divins
Des amants qui se bisent
Et puis au mois de juin
On pense à ses valises
Car très bientôt revient
L’heure des vacances promises  » Robert CASANOVA (Poète français)

Un phare …

 » Il a toujours été là
comme érigé par les vents
pour qu’il puisse être ce mât
enchâssé dans l’océan

Et même si des carcasses gisent
comme des monstres de fer crevés
au pied de ces tempes grises
faites de sel sur les rochers

Il a l’œil sur les ressacs
colosse au squelette de pierre
combien d’Ulysse loin d’Ithaque
lui doivent leur retour à terre

Dans les abîmes de la nuit
sur l’incertitude des heures
quand le soir se sait promis
aux égarements des douleurs

Quand la colère des flots fume
et qu’elle déchire les récifs
que des écharpes de brumes
s’enroulent à son corps massif

Il tend son flanc souverain
aux torpeurs enivrantes
affilé par les embruns
et leurs étreintes conquérantes

Sur l’autel de ses écumes
dans l’orgie de ses reflux
quand sous ses quartiers de lune
la peur déroule ses affûts

Il émerge de cette attente
épuisé par les aguets
et les craintes de ces tourmentes
qui menacent de leurs ivraies

Ce n’est que dans les aurores
qu’il détend son col de nuit
puis renaît de ses efforts
et de ces scènes d’agonies  » Didier VENTURINI ( Poète français )

PHARE

L’escargot et la coccinelle …

 » L’escargot

Est-ce que le temps est beau ?
Se demandait l’escargot
Car, pour moi, s’il faisait beau
C’est qu’il ferait vilain temps.
J’aime qu’il tombe de l’eau,
Voilà mon tempérament.

Combien de gens, et sans coquille,
N’aiment pas que le soleil brille.
Il est caché ? Il reviendra !
L’escargot ? On le mangera. »

La coccinelle

« Dans une rose à Bagatelle
Naquit un jour la coccinelle.
Dans une rose de Provins
Elle compta jusqu’à cent-vingt.
Dans une rose à Mogador
Elle a vécu en thermidor.
Dans une rose à Jéricho
Elle évita le sirocco.
Dans une rose en Picardie
Elle a trouvé son Paradis :
Coccinelle à sept points,
Bête à bon Dieu, bête à bon-point. « 

Robert DESNOS (Poète français / Poèmes-comptines Extraits de son recueil Chantefables et Chantefleurs)

Au maître d’un jardin …


 » De ce chaume heureux possesseur,
De bon cœur, hélas ! que j’envie
Tes travaux, ta philosophie,
Ta solitude et ton bonheur !

Pour prix des soins que tu leur donnes,
Tes arbustes reconnaissants
Et des printemps et des automnes
Te prodiguent les doux présents.

Ô trop heureux qui peut connaître
La jouissance de cueillir
Le fruit que ses soins font mûrir,
La fleur que ses soins ont fait naître !

Toujours la terre envers nos bras
S’est acquittée avec usure.
Qui veut s’éloigner des ingrats
Se rapproche de la nature.

Ne craindre et ne désirer rien,
Etre aimé de l’objet qu’on aime,
C’est bien là le bonheur suprême ;
C’est le sort des dieux, c’est le tien.  » Antoine Vincent ARNAULT (Poète français, auteur dramatique, homme politique, secrétaire de l’Académie française. Ce poème a été écrit en 1792 et fait partie de son recueil Poésies mêlées paru en 1826)

Un tableau signé Anna ROSE

L’églantine …

L’églantine, fleur de mai et de juin, fut considérée comme la fleur des poètes par l’Académie des Jeux floraux à Toulouse (Institution littéraire fondée en 1323 par des troubatours)

 » Églantine ! Humble fleur, comme moi solitaire,
Ne crains pas que sur toi j’ose étendre ma main.
Sans en être arrachée orne un moment la terre,
Et comme un doux rayon console mon chemin.
Quand les tièdes zéphirs s’endorment sous l’ombrage,
Quand le jour fatigué ferme ses yeux brûlants,
Quand l’ombre se répand et brunit le feuillage,
Par ton souffle, vers toi, guide mes pas tremblants.

Mais ton front, humecté par le froid crépuscule,
Se penche tristement pour éviter ses pleurs ;
Tes parfums sont enclos dans leur blanche cellule,
Et le soir a changé ta forme et tes couleurs.
Rose, console-toi ! Le jour qui va paraître,
Rouvrira ton calice à ses feux ranimé ;
Ta mourante auréole, il la fera renaître,
Et ton front reprendra son éclat embaumé.

Fleur au monde étrangère, ainsi que toi, dans l’ombre
Je me cache et je cède à l’abandon du jour ;
Mais un rayon d’espoir enchante ma nuit sombre :
Il vient de l’autre rive… et j’attends son retour.  » Marceline DESBORDES-VALMORE (Poétesse française / Extrait de son recueil Romances / 1830)