Venise ! Ô souvenir …

« Venise ! ô souvenir ! ô cité blanche et rose !
Merveilleux alcyon, fleur de la mer éclose
Entre l’azur uni des ondes et le ciel,
Cité-femme au doux nom, ô mon charme éternel,
Venise, ainsi que toi, les Vénus étaient blondes.

Tes pieds exquis trempés aux vagues peu profondes,
Telle qu’une princesse en habits d’Orient,
Tu te penches, et l’eau reflète, en souriant
Le rythme de ton corps et tes parures vaines.

Des canaux délicats et minces sont tes veines;
Ainsi qu’aux êtres fins le silence t’est cher.
Les marbres éclatants et roses sont ta chair,
Si pure qu’on dirait que les brises sonores
Y font courir le sang des vivantes aurores.

Tes yeux sont le rayon divin du ciel léger,
Et ton sourire fait le jour, sans y songer.
Ainsi mon rêve épris n’a pas pu se défendre
De t’aimer d’un amour mélancolique et tendre,
Comme on aime une femme, et comme on tend les bras
Aux belles visions qui ne s’envolent pas.

J’ai connu ton regard et j’ai connu ta bouche.
Je sais ce que le ciel, quand le soleil se couche,
Met à ton front serein de grâce et de splendeur.
Un souffle du Lido m’apporta cette fleur,
Errante sur les Mots brodés d’écumes blanches.
Les cigales au loin résonnaient dans les branches.

Lorsqu’il fallut, hélas ! partir et te quitter,
Je te laissai mon cœur sans en rien emporter.
Tel l’amant ô la plus auguste des maîtresses.
S’arrache, frissonnant, aux dernières caresses. » Albert MÉRAT (Poète français – Extrait de son recueil Les villes de marbres en 1869)

FARNACE RV 711 … Antonio VIVALDI

(Vidéo : Ouverture – I SOLISTI VENETI – Direction Claudio SCIMONE)

Il s’agit d’un opéra ( précisément un dramma per musica ) créé en 1727 à Venise, dirigé par le compositeur lui-même. Le livret est du poète Antonio Maria Lucchini. Il avait été utilisé une première fois pour le Farnace de Leonardo Vinci auquel Vivaldi avait assité à Rome en 1724.

L’œuvre sera remaniée profondément à diverses reprises jusqu’en 1737, avec des rajouts d’arias, de récitatifs, d’actes aussi. La dernière fois que Vivaldi le fera ce sera avec l’intention de le présenter à Ferrare. Ces modifications avaient pour but d’obtenir un opéra parfaitement abouti. A l’époque, il faut savoir que Vivaldi avait moins de succès à Venise car la Sérénissime avait une préférence pour les opéras napolitains.

Farnace est une histoire de devoir, d’amour, d’enjeu politique. Une œuvre brillante, dramatiquement puissante, complexe, éloquente, passionnée, colérique, nostalgique aussi. L’émotion et la noblesse du cœur sont bien présentes également. Elle donne raison à ce que disait l’abbé Conti en 1727 à savoir que la musique de cet opéra est variée et bouge à la fois dans le sublime et dans le tendre. Les arias sont magnifiques , virtuoses, expressives et tout en nuances.

Elle tombera malheureusement dans l’oubli et n’en ressortira que dans le dernier quart du XXe siècle. La partition ultime est conservée à Turin.

(Vidéo : « Perdona o mio figlio amato  » – Philippe JAROUSSKY (Contre-ténor) – Il est accompagné par L’ENSEMBLE MATHEUS dirigé par Jean-Christophe SPINOSI)
(Vidéo :  » Gelido in ogni vena  » – Max Emanuel CENCIC (Contre-ténor) – Il est accompagné par l’Ensemble I BAROCCHISTI – Direction : Diego FASOLIS)

Prendre le temps …

 » Prendre le temps est important. Oui, je pense que tout va trop vite. On parle trop vite, on réfléchit trop vite (quand on réfléchit ! ). On envoie des mails et des textos sans se relire, on perd l’élégance de l’orthographe, la politesse, le sens des choses. Non, non je ne suis pas contre le progrès, j’ai juste peur qu’il isole davantage les gens. » Grégoire DELACOURT (Écrivain français – Extrait de son livre La liste de mes envies)

Grégoire DELACOURT