» L’hiver captif gronde au fond des glacières.
Allez quérir les aloyaux vermeils !
Il est déjà dix heures au soleil
Et les cricris aiguisent la lumière.
Voici la viande à l’arôme engourdi ;
Pour l’embaumer les enfants ont cueilli
L’ardent bouquet des bonnes cuisinières.
Le persil fol et le laurier sévère,
Le thym qui grille les zéphyrs.
Entendez-vous l’huile rousse assaillir
le boeuf saignant dans les cuisines claires ?
L’air se fleurit de fumets réveillés !
Petits enfants, il est temps de lier
L’ardent bouquet des bonnes cuisinières.
Sève de feu, suc vert, essence amère
Vont s’exalter dans les jus gazouilleurs
Et ranimer l’âme d’un vieux bonheur,
En déroulant la senteur familière
Qui pavoisait le matin des jeudis
Au temps léger où je cueillais aussi
L’ardent bouquet des bonnes cuisinières. » Lucienne DESNOUES (Poétesse française / Extrait de son recueil Jardin délivré)
