
Bernini fut un artiste majeur, un maître dans l’art de la sculpture qui fut également peintre, architecte et s’est occupé de théâtre.
Châteaubriand a dit un jour que « la sculpture donne une âme au marbre » … Très franchement cela se justifie lorsque l’on admire les oeuvres du Bernin. Ce dernier voulait rendre le marbre aussi souple et fluide que ne pouvait l’être la cire : il y est parfaitement parvenu, et ce dans les moindres détails. Ces sculptures ont, en effet, non seulement une âme, mais elles sont très expressives, dégagent de l’émotion. Que ce soit dans l’expression des gestes ou du visage, ou bien encore dans le frisé ou bouclé des cheveux, le plissé des tissus, la marque des mains sur la chair, il s’est évertué à une exécution parfaitement détaillée où le réalisme y est incroyablement surprenant.
Il a été à son époque un immense sculpteur baroque, très imaginatif, doté d’une grande technique, doué pour le rendu des mouvements. Son talent ne s’est pas limité à la sculpture de groupes ou de bustes, mais s’est étendu à sa peinture, et à l’architecture avec notamment les fontaines de Rome ( La fontaine des quatre fleuves ( achevée en 1652 ) – – La fontaine du Triton – La fontaine du Maure – La fontaine des Abeilles – La fontaine de la Place d’Espagne – La fontaine Barcaccia etc… )qui, aujourd’hui, sont tant admirées des touristes, la réalisation de palais ( Palais Montecitorio, Palais de St André du Quirinal ou Palais Barberini entre autres), l’édification et décoration de chapelles ( Chapelle Cornaro etc … ) , la restructuration des routes et des places de la ville et tant d’autres choses encore, la liste est longue ! . Tout son travail demeure un témoignage important de l’époque baroque.
Il reste le grand architecte de la basilique St Pierre de Rome un lieu où il a travaillé et a été engagé pour de nombreux ouvrages de décorations internes, mais également en extérieur sur la place St Pierre. Cela avait commencé en 1624 quand il était un tout jeune artiste et trente ans plus tard il y était encore alors que depuis, différents papes s’étaient succédés.
Et pourtant il fut aussi critiqué, jalousé, il n’a pas toujours plu à certains amateurs d’art et comme d’autres artistes le furent avant lui, il tombera même en disgrâce. Il faudra attendre quelques siècles plus tard pour que son travail soit véritablement compris, reconnu et admiré.
Il a, de par son travail, réuni les différentes caractéristiques du type baroque que ce soit dans la dynamique, le mouvement, l’énergie. Ses oeuvres furent le miroir de sa personnalité : il y a tout ce que son père a pu lui enseigner, mais tout le côté novateur et imaginatif que lui a mis en place et qui vont inspirer les générations à venir.
Il a vécu très vieux ( 82 ans) , verra neuf papes se succéder à Rome. Ce que l’on sait de lui en tant qu’homme c’est qu’il était très social, à l’écoute des autres, entretenant d’excellentes relations avec ses commanditaires. Un homme de principes, de foi, de forte spiritualité, allant à la messe chaque jour pour assister à l’office, et, ayant un sens assez profond de la famille.
Il a été marié à la fille d’un avocat : Caterina Tezio, laquelle lui a donné 9 enfants : Pietro, Paolo, Angelica, Agnese, Cecilia, Dorotea, Maria, Francesco, Francesco-Domenico.
Bernini est né à Naples en 1598. Son père, Pietro, est un sculpteur ( sur marbre ) d’origine toscane. Ce dernier détail va compter dans la vie de son fils qui, curieusement, se sentira plus toscan que napolitain et très proche de la tradition issue de la Renaissance florentine.
Pietro se rendra très vite compte que son fils partage la même passion que lui et qu’il est doué pour le dessin. C’est donc tout naturellement que débutera sa formation dans l’atelier de son père.
En 1606, la famille part pour Rome où règne une grande ferveur artistique qui semblait plus bénéfique à Pietro pour son travail.
Gian Lorenzo va bénéficier durant un certain temps de l’enseignement et des conseils de son père. Ce dernier a reçu une demande de travaux de la part du pape Paul V pour des stèles funéraires ( la sienne et celle de Clément VII qui l’avait précédé) et bien entendu son fils l’accompagne sur le chantier. Cela lui permettra d’apprendre non seulement comment on conçoit ce type de sculpture ( groupe ) mais également ce qui se trame tout autour dans l’architecture pour l’accueillir.
Il sera inscrit, par la suite, à l’Académie du peintre baroque Annibal Carracci qui va se montrer fortement impressionné par ses dons. Là commence les première sculptures. Il avait déjà séduit le Pape Paul V avec un portrait qu’il avait fait de lui, mais ses premières oeuvres sculptées retiendront son attention, tant et si bien qu’il le présentera à des personnalités qui comptaient à Rome, des mécènes, dont Scipione Borghese son neveu.

Ce dernier lui commande différentes pièces : Enée Anchise et Ascagne en 1619, le Rapt de Proserpine en 1620/23, Apollon et Daphné en 1624/25 et un buste de lui en 1632.



» Je vis le groupe d’Apollon et Daphné du Bernin, travaillé avec une délicatesse qui semble impossible, le travail des feuilles de laurien qui est merveilleux. Je ne pensais pas qu’un nu puisse être aussi beau » – Antonio CANOVA ( Sculpteur italien)
Parmi les autres mécènes se trouvait Maffeo Barberini qui deviendra le pape Urbain VIII après le pontificat de Grégoire XV. Il est sous le charme du travail de Bernini. Il le voit comme un digne successeur de Michel-Ange, capable non seulement d’exceller en tant que sculpteur, mais également comme peintre et architecte. Entre eux va naître un rapport de travail certes, mais affectif également.
» Votre chance est grande d’avoir le cardinal Maffeo Barberini comme pape, mais la nôtre est beaucoup plus grande d’avoir le chevalier Bernini vivant dans notre pontificat » Urbain VIII


Le premier travail qu’il lui confiera en 1624 fut l’édification d’un monument pour le maître-autel de la croix. Bernini va voir les choses en grand ( monumental même ) et en bronze pour réaliser un baldaquin avec des colonnes torsadées, dont la hauteur atteint presque les 30 mètres ! Une oeuvre qui sera vivement critiquée, non pas pour elle-même mais pour tout le bronze qui fut utilisé et prélevé des poutres du Panthéon pour la réaliser. Elle sera achevée en 1633.

Entre temps, en 1627, on lui commandera le tombeau du pape qu’il terminera quelques années plus tard.
Critiqué certes, mais nommé architecte en chef en 1629 par le Pape. Nombreuses furent les oeuvres tant sculptées qu’architecturales qui suivront et avec elles la guerre de rivalité entretenue avec d’autres artistes, notamment celui qui était l’assistant de Carlo Moderno ( chef-architecte de Saint Pierre à Rome) à savoir Francesco Borromini. Ils se disputeront, de façon assez mémorable, le poste de Moderno lorsque celui-ci décèdera et c’est Bernini que le pape Urbain VIII affectionnait, qui va l’obtenir.
En 1644 le pape Urbain VIII décède. C’est Gianbattista Pamphili qui devient pape sous le nom de Innocent X. L’entente et la collaboration ne sera pas la même car ce nouveau pape est une personnalité très froide, austère. Il ordonnera même la démolition du campanile de St Pierre réalisé par Bernini ce qui entraînera l’arrivée d’autres artistes avides et souhaitant profiter de cette opportunité pour le faire tomber en disgrâce.

Il réussira malgré tout à obtenir quelques chantiers importants pour des fontaines mais cette époque sera celle de ce merveilleux chef-d’œuvre dans la chapelle Cornaro, en l’église Santa Maria de la Vittoria à Rome, à savoir » L’extase de Sainte Thérèse » une commande du cardinal Cornaro pour rendre hommage à la sainte qui fut canonisée en 1622. La réalisation de ce groupe se fera entre 1647 et 1652.

Bernini continuera sa collaboration avec les papes qui suivront, notamment Alexandre VII Chigi après Innocent X. C’est à sa demande qu’il réalisera la colonnade de la place Saint Pierre.
En 1665, c’est le départ pour la France. Colbert, ministre du Roi Soleil, le convie à la Cour, ce qui ne fut pas chose facile car le pape ne souhaitait pas trop le laisser partir. Il fut fut bien reçu, visita Versailles, pu rencontrer le roi et avoir avec lui des entretiens, notamment au château de St Germain en Laye. Il semblerait qu’ils se soient bien entendus.
On le fait venir pour des travaux ayant référence à la restructuration du Louvre, mais son projet ne sera pas retenu. Il réalisera néanmoins un buste du roi ainsi qu’une statue équestre ( laquelle sera terminée à Rome et livrée à la France plus tard)..

De retour en Italie il travaillera sur le tombeau du pape Alexandre VII en la basilique St Pierre . C’est une de ses merveilleuses oeuvres. Le Bernin a réalisé une sculpture au-dessus d’une porte ( symbole de l’enfer ) et tout autour de son encadrement. Le pape est à genoux en signe d’humilité avec à ses pieds un sablier référence au temps qui s’écoule.

En 1674 il terminera » La bienheureuse Ludovica Albertoni » un de ses derniers groupes, une sculpture absolument magnifique , forte émotionnellement puisqu’elle la représente dans son dernier soupir. Elle se trouve à l’église San Francesco à Ripa.

Il est mort à Rome en 1680 après avoir voué sa vie à l’art qu’il soit sculptural, architectural ou pictural, une vie faite de joies mais aussi de moments difficilement dramatiques où il a dû notamment affronter la critique. Sa popularité de l’époque et sa spiritualité intense furent liées. Il s’est voulu libre, a imposé son style à toute une époque, il a étonné, émerveillé et magnifié dans cette ville qui a forgé toute son inspiration : Rome.
