» Le château de Malmaison est un miraculé. Amputé par la guerre de 1870, abandonné par la IIIe République qui n’avait aucune envie de conserver ce lieu emblématique du bonapartisme, l’ex-palais impérial a failli disparaître plusieurs fois. Clin d’œil à l’histoire : c’est grâce à un homme appelé Osiris, comme la divinité égyptienne, que la demeure a pu être sauvée.
Château de Malmaison
Ce généreux Monsieur Osiris, surnom mystérieux qui supplantera son véritable état civil ( Daniel Iffla) fait d’abord fortune dans la finance et l’immobilier; Un pactole que » ce personnage hors du commun, issu d’une vieille famille juive de Bordeaux, utilisera toute sa vie pour différentes causes comme la restauration des monuments « éclaire le directeur de Malmaison. Le mécène rachète en 1896 Malmaison alors en bien piteux état, le rénove et l’offre à l’État français en 1903. La demeure devient alors un musée national deux ans plus tard et retrouve bientôt des meubles d’époque.
Daniel IFFLA/OSIRIS
Situé à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) , le modeste château de Malmaison n’avait pas grand chose pour entrer dans l’Histoire de France, ni devenir un musée national aux 70.000 visiteurs annuels.
Une femme en a décidé autrement : Joséphine Bonaparte a 36 ans en 1799. Son général de mari, qui est en train de s’offrir notoriété et richesse en Égypte, est obsédé par l’idée de posséder des terres. Il se verrait bien en Bourgogne, ou à Ris-Orangis (Essonne). Mais Madame rêve du pittoresque paysage de Malmaison. Ses « coteaux pareils à des montagnes » lui rappellent-ils la Martinique de son enfance ? Toujours est-il qu’elle » s’est entichée de ce château comme on s’accroche à une terre promise » compare Christophe Pincemaille, historien-documentaliste.
Marie-Josèphe Rose TASCHER de la PAGERIE dite Joséphine de BEAUHARNAIS – (1763/1814) Elle fut Impératrice des français, reine d’Italie, Duchesse de Navare. Avant d’être la première épouse de Napoléon, elle avait épousé Alexandre de Beauharnais dont elle a eu deux enfants Eugène et Florence. Tableau de Henri-François RIESENER
» Dans le parc de Malmaison » Oscar REX – » Je n’ai pas passé un jour sans t’aimer, je n’ai pas passé une nuit sans te serrer entre mes bras, je n’ai pas pris une tasse de thé sans maudire la gloire et l’ambition qui me tiennent éloigné de l’âme de ma vie … » écrivait un jour Napoléon à Joséphine
Joséphine convainc son mari, elle achète, il paie. Oui, mais voilà, Napoléon prend du galon. Six mois après l’achat de Malmaison, il endosse de costume de premier consul, puis d’empereur. Bye Bye la maisonnette où l’on vient juste se reposer à chaque décadi ( équivalent du dimanche dans le calendrier républicain) . Malmaison se transforme en lieu de pouvoir où l’on décide par exemple de la création de la Cour des comptes ou de celle de la Légion d’honneur. Le pape himself y débarque.
Extensions de toutes sortes, aménagements … Le palais est sommé de suivre le mouvement. Aujourd’hui encore on peut admirer l’ingéniosité des architectes (Percier et Fontaine) qui, par des jeux de miroirs et de trompe-l’œil, agrandissent les pièces comme par magie. On peut aussi apprécier la patte de Joséphine dans la décoration reconstituée de nos jours avec un réalisme bluffant, comme si l’on allait tomber nez à nez avec le couple impérial.
Le mobilier, commandé à des maîtres artisans, est unique. Joséphine a osé les couleurs vives, le jaune qui claque, le rouge qui tranche, les contrastes saisissants. « Ce sont des associations qui étaient à la pointe de la mode à l’époque « décrypte Isabelle Tamisier-Vétois (Conservatrice), « Les visites, aujourd’hui, à Malmaison, porte autant sur l’histoire que sur l’art, tant politique et esthétique sont ici intimement liées. »
On a beau être à l’étroit à Malmaison, la fièvre collectionneuse de Joséphine ne freine pas, même après son divorce d’avec Napoléon en 1809. Il lui laisse le château, son titre d’impératrice et tout le tintouin. Passionnée de sciences naturelles, elle fait venir des kangourous, des zèbres, des perroquets et autres cygnes noirs ( réinstallés aujourd’hui dans le parc) . Même démarche sur le plan botanique. A l’avant-garde, elle soutient les femmes artistes de la peinture troubadour qui ne deviendra tendance qu’après sa mort.
Elle est décédée brutalement à 51 ans, dans son lit, que l’on peut voir encore aujourd’hui. L’histoire s’arrête-là ? Elle a continué par un étonnant pied-de-nez : répudiée parce qu’elle ne pouvait assurer la descendance de Bonaparte, Joséphine a donné naissance, via les enfants de son premier mariage, à plusieurs dynasties européennes (les actuelles familles royales de Suède, Norvège, Belgique … ) » Si la reine Victoria est considérée comme la grand-mère de l’Europe, Joséphine en est l’arrière-grand-mère « soutient Amaury Lefébure, directeur du musée de Malmaison) » Grégory PLOUVIEZ (Journaliste français-chef-adjoint service de la culture au journal Le Parisien)
La harpe de Joséphine a été réalisée par les luthiers COUSINEAU Père & Fils – Elle se trouve dans le salon de musique
» L’amour prêt à lancer un trait » Marbre réalisé par Jean-Pierre-Antoine TASSAERT – 1780 env. Il se trouve dans le vestibule du château
» Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard » – Jacques Louis David. Il existe quatre versions de ce tableau. Les experts affirment que le plus abouti est celui qui se trouve au château de Malmaison. Il est exposé au premier étage. Il fut commandé en 1800 par le roi d’Espagne, sera repris par Joseph le frère de Napoléon lorsqu’il a été le roi de ce pays. Il l’emportera avec lui aux Etats-Unis. Ce chef-d’œuvre fera, à nouveau, le voyage vers l’Europe, arrivera à Rome (Italie), sera exposé chez la fille de Joseph, la princesse de Canino. Il sera légué en 1949 au Musée national de Malmaison par la petite-fille de Joseph .