C’est une fête en vérité ..

 » C’est une fête en vérité,
Fête où vient le chardon, ce rustre ;
Dans le grand palais de l’été
Les astres allument le lustre.

On fait les foins. Bientôt les blés.
Le faucheur dort sous la cépée ;
Et tous les souffles sont mêlés
D’une senteur d’herbe coupée.  » Victor HUGO -( Poète, dramaturge, écrivain, romancier et dessinateur romantique français – Extrait de son poème Laetitia rerum/1877 – Recueil  » L’art d’être grand-père)

Tableau de Vincent VAN GOGH d’après MILLET

La photographie … par Fouad ELKOURY

« Ce n’est jamais facile de devenir photographe. Tout comme il n’est pas facile d’aimer. Ça arrive, c’est tout. Et quand vient la révélation, il faut savoir discerner l’essentiel et avoir le courage d’aller jusqu’au bout. Il faut une envie profonde couplée à une attention de chaque instant pour photographier. Le photographe est habité par ce qu’il cherche, il est dévoré par le besoin de communiquer une émotion ressentie et la restituer sous forme d’image. Tout le temps que dure la prise de vue, il est animé par un désir d’autant plus aigu qu’il est incertain d’atteindre son objectif. Sur un cliché effectivement pris, combien d’autres sont ratés ? Et combien d’autres ont été laissés de côté ? On passe souvent près d’une photo dont on sait qu’elle sera bonne, simplement parce que les conditions du moment nous auront empêché de la prendre. Tout d’un coup, on voit la photo, on sent dans son bras un tressaillement et parce que l’on a pas d’appareil sur soi, on est, pendant ce court instant, en état de manque …. Ces images vues, mais non prises, sont celles dont on se souvient longtemps après. Elles font partie du parcours du photographe au même titre que les autres. Il les a en tête quand il regarde l’ensemble de son travail, elles s’inscrivent dans sa mémoire comme des images virtuelles et meurent avec lui faute de traces. » Fouad ELKOURY ( Photographe et cinéaste libanais – Extrait de son livre La Sagesse du Photographe )

FOUAD ELKOURY
Fouad ELKOURY

Villa dans les orangers … Berthe MORISOT

 » Petite par la taille, cette toile n’en est pas moins importante par la qualité et la place qu’elle tient dans l’œuvre de Berthe Morisot. Située sur les hauteurs de Nice, la villa Arnulfi domine la ville et dispose d’un joli point de vue. Ce n’est pas cet aspect qui a retenu l’attention de l’artiste, mais, au contraire, la villa cachée et protégée derrière ses orangers que précède une haie bien dense.

Pour peindre ce paysage, Berthe Morisot, s’est installée dans le terrain voisin qui semble peu entretenu si l’on en juge par l’état du sol et, à gauche, par la souche dont l’ombre allongée montre qu’il s’agit d’une fin de journée. Trois ou quatre orangers seulement portent des fruits qui brillent au soleil. La silhouette italianisante de la villa se dresse au-dessus des orangers : son crépis légèrement rosé et le toit de tuiles forment un contraste de ton et de luminosité avec le vert des arbres fruitiers, et, au-dessus, le bleu du ciel.

La composition est une nouvelle fois assez audacieuse : la villa n’occupe pas plus du huitième de la toile, et, pourtant, c’est vers elle que le regard se tourne ; le jardin, au premier plan, remplit la moitié de la toile, mais il n’est là que pour orienter le regard vers les orangers, puis vers la villa. Le premier plan du jardin un peu plus profond vers la gauche, et la percée au-dessus de la haie laissant voir des communs avant la villa, orientent la perspective vers le haut de la composition et vers la gauche. Au second plan, la villa se trouve légèrement décalée par rapport à cette première perception de l’espace. Dans un paysage au motif italianisant une telle construction ne pouvait que choquer les tenants du classicisme.

Berthe Morisot avait étudié ce motif dans deux aquarelles, l’une de plus loin, sans doute depuis l’entrée de la propriété, l’autre de près. Dans cette dernière, la villa Arnulfi est vue du parc avec quelques arbustes au premier plan qui laissaient voir les trois étages de cette grande demeure qui est tout le sujet.

Eugène Manet choisit cette toile pour la joindre, hors catalogue, à l’envoi de son épouse à la 7e exposition des impressionnistes. Le 2 mars 1882, il écrit à Berthe  » Votre paysage de la ville Arnulfi est charmant. Vous l’avez enlevé. » Comme une grande partie de son envoi, elle est accrochée après l’ouverture de l’exposition, c’est ainsi que nombre de critiques ne peuvent en rendre compte, notamment ceux qui sont favorables car présents le jour du vernissage. La Villa Arnulfi est dans un cadre gris avec des ornements d’or. Une fois l’accrochage complété, Eugène put enfin lui écrire : Édouard, qui est venu ce matin à l’exposition, a trouvé votre envoi un des meilleurs. Malheureusement, il ne lui rapporta pas les commentaires faits devant chaque œuvre.

Il est amusant de constater que l’année suivante, Eugène Manet, alors qu’il séjournait dans le Midi auprès de son frères Gustave malade et qui décèdera quelques mois plus tard à Menton, s’est intéressé à cette maison et a même songé à l’acheter.

Berthe Morisot devait beaucoup aimer cette toile puisqu’elle choisit de l’exposer deux autres fois. D’abord en 1886, à la 8e exposition impressionniste, sous le titre Paysage à Nice. A cette occasion, Maurice Hermel la remarque  » pour une justesse de valeur, une fraîcheur de coloris, une légèreté de touche incomparable. La lumière y voltige, les tons y prennent la transparence de l’aquarelle  » . En 1892, lors de son unique exposition personnelle, chez Boussod et Valadon, le titre est Vue de Nice. Il figurera ensuite à la rétrospective posthume en 1896. Julie, la fille de Berthe, note dans son Journal :  » Villa dans les orangers fait aux environs de Nice la première fois que nous y sommes allés ; au milieu des orangers d’un vert jauni où brillent les pommes d’or, s’élève une villa rose au toit de tuiles qui se détache sur le ciel si bleu, le ciel du Midi, ce magnifique paysage est aussi accroché dans ma chambre« .  »Hugues WILHELM (Historien de l’art, commissaire scientifique d’expositions)

 » Villa dans les orangers à Nice  » 1882 Berthe MORISOT

L’odeur …

 » De tous les sens, l’odorat est celui qui me frappe le plus. Comment l’odeur, le goût, se font-ils parfum, comment nos nerfs se font-ils nuances, interprètes subtiles, sublimes de ce qui ne se voit pas, ne s’entend pas, ne s’écrit pas avec des mots ? L’odeur serait comme une âme, immatérielle  » Marcel HANOUN (Cinéaste et écrivain français) .

La jacinthe des bois …

 » La jacinthe des bois est la fleur la plus douce.

Des vagues dans l’air d’été,

ses fleurs ont le pouvoir le plus puissant

pour apaiser les soins de mon esprit… » Emily BRONTË (Poétesse et romancière britannique)

 » Jacinthe des bois  » un tableau de Rita READMAN – La jacinthe des bois est aussi appelée  » le muguet bleu  » ou la  » scille penchée  » ou la  » jacinthe sauvage  »

La poule …

 » Pattes jointes, elle saute du poulailler, dès qu’on lui ouvre la porte.
C’est une poule commune, modestement parée et qui ne pond jamais d’œufs d’or.
Éblouie de lumière, elle fait quelques pas, indécise, dans la cour.
Elle voit d’abord le tas de cendres où, chaque matin, elle a coutume de s’ébattre.
Elle s’y roule, s’y trempe, et, d’une vive agitation d’ailes, les plumes gonflées, elle secoue ses puces de la nuit.
Puis elle va boire au plat creux que la dernière averse a rempli.
Elle ne boit que de l’eau.
Elle boit par petits coups et dresse le col, en équilibre sur le bord du plat.
Ensuite elle cherche sa nourriture éparse.
Les fines herbes sont à elle, et les insectes et les graines perdues.
Elle pique, elle pique, infatigable.
De temps en temps, elle s’arrête.
Droite sous son bonnet phrygien, l’œil vif, le jabot avantageux, elle écoute de l’une et de l’autre oreille.
Et, sûre qu’il n’y a rien de neuf, elle se remet en quête.
Elle lève haut ses pattes raides, comme ceux qui ont la goutte. Elle écarte les doigts et les pose avec précaution, sans bruit.
On dirait qu’elle marche pieds nus. « Jules RENARD (Écrivain et auteur dramatique français – Extrait de son livre Histoires naturelles/1896)

Tableau de Walter Frederick OSBORNE

Symphonie N°2 Op.27 … Sergei RACHMANINOV

Après l’accueil désastreux de la Symphonie N.1, Rachmaninov sombrera dans une profonde dépression qui va donner suite à un silence de trois ans. Il se fera soigner et reviendra plus confiant pour se remettre à composer. D’abord le magnifique Concerto N.2, puis cette superbe Symphonie (1906/07) qu’il créera à Saint-Pétersbourg en 1908.

Elle obtiendra un réel succès, deviendra populaire et célèbre. C’est une page toute en nuances, parfaitement équilibrée, dotée de riches couleurs orchestrales, étincelante, rayonnante, généreuse, vigoureuse, avec un sublime, mélodieux et vibrant Adagio (27’39 vidéo ci-dessous) qui a été repris, entre autres, par John Barry pour la musique du film Somewhere in time (Quelque part dans le temps) réalisé en 1980 par Jeannot Szwarc.

(Vidéo : Vladimir ASHKENAZY à la direction du CONCERTGEBOUW ORCHESTRA)

A la rencontre de : Adélaïde LABILLE-GUIARD …

Adélaide LABILLE
 » Autoportrait avec deux élèves Mademoiselle Gabrielle Capet et Mademoiselle Carreaux de Rosemond  » – 1785 – Adélaïde LABILLEGUIARD

 » Adélaïde Labille est une artiste aujourd’hui peu connue, mais dont la mémoire doit être réhabilitée. Née en 1749 dans la paroisse Saint-Eustache, d’un père marchand en mercerie et  colifichets, elle entre dès 1763 dans l’atelier de François-Elie Vincent, portraitiste, miniaturiste, peintre sur émail, et membre de l’Académie de Saint-Luc. A l’âge de 20 ans, elle épouse Nicolas Guiard, mais l’union ne sera pas heureuse et au bout de dix ans les conjoints se séparent.

Au cours de l’année 1769, Adélaïde commence un second apprentissage dans le domaine de la peinture : elle s’initie au pastel avec le maître du genre, Maurice Quentin de La Tour. Cet artiste, qui passait pour avoir un caractère très difficile, semble avoir apprécié le talent de sa jeune élève puisqu’il va la garder cinq années dans son atelier.

En 1776, elle entame une troisième formation auprès du fils de son premier maître, François-André Vincent qui rentre de Rome. Non seulement cet artiste, prix de Rome et peintre d’histoire, genre alors le mieux considéré, lui apprendra la technique de la peinture à l’huile, mais il sera l’amour de sa vie.

François André VINCENT par Adélaïde LABILLE
 » Portrait de François-André VINCENT  » par Adélaïde LABILLEGUIARD

Adélaïde devient une artiste confirmée, expose dans plusieurs Salons, enseigne à son tour la peinture à des jeunes filles et surtout elle est reçue le 31 mai 1783 à l’Académie Royale de peinture et sculpture.  Ce jour-là, une autre femme faisait son entrée dans la compagnie et sa renommée éclipsera plus tard celle d’Adélaïde : Élisabeth Vigée-Lebrun peintre et épouse de peintre, et surtout portraitiste officielle de la reine Marie-Antoinette, au sort de laquelle elle semble liée pour l’éternité.

Adélaïde obtient pourtant le titre de peintre de Mesdames, à savoir les tantes du roi Louis XVI. Le début de la Révolution ne bouleverse pas trop l’activité de l’artiste qui reçoit encore des commandes. Mais en 1792, elle doit se réfugier à la campagne et surtout l’année suivante, son atelier est victime du règlement sur la destruction des signes extérieurs de la noblesse ;  plusieurs portraits et la Réception faite par le Comte de Provence d’un membre de l’Ordre de Saint-Lazare sont détruits. S’ensuivra alors pour l’artiste une grande phase de dépression.

En 1785, le rétablissement des Académiciens, grâce à la création de l’Institut de France, lui permet de reprendre ses activités. Elle expose à nouveau au Salon, reçoit une pension et un logement de fonction. Ayant pu divorcer de son premier mari en 1793, elle se remariera avec François-André Vincent en 1800. Chacun bénéficiera d’un appartement et d’un atelier dans le palais des Quatre-Nations. Malheureusement les époux ne profiteront guère de leur nouvelle situation car Adélaïde meurt au printemps 1803.

Les tableaux peints par Adélaïde Labille, dont on peut voir plusieurs exemplaires à Versailles, révèlent une portraitiste talentueuse, ayant su capter la psychologie de ses modèles, mais sachant tout aussi habillement rendre la texture, les couleurs, et les ornements des étoffes les plus variées.  » Catherine CARDINAL (Professeur d’Université, spécialiste de l’histoire de la peinture des XVIIe et XVIIIe siècles. Elle a, durant un certain temps, dirigé le Musée International de l’Horlogerie à Chaux-de-Fonds en Suisse, et créé l’Institut l’Homme et le Temps)

AUGUSTIN PAJOU 2
« Portrait d’Augustin Pajou modelant le buste de son professeur Jean-Baptiste Lemoyne  » – 1782 – Adélaïde LABILLEGUIARD
Adélaïde LABILLE portrait de Victoire de France 1788
 » Portrait de Victoire de France  » 1788 – Adélaïde LABILLEGUIARD (Victoire est l’une des filles de Louis XV et Marie LESZCZYNSKA)
« Étude pour Marie-Gabrielle CAPET » Adélaïde LABILLE-GUIARD (Melle Capet fut une peintre française qui a étudié avec Adélaïde Labille)
 » Portrait de Christine Geneviève Bron épouse Mitoire avec ses deux enfants » Adélaïde LABILLE-GUIARD( Christine Geneviève était mariée à Charles Mitoire du Moncel, Commis à la recette générale des finances du Lyonnais)
 » Portrait de Louise Elisabeth de France et son fils  » Adelaïde LABILLE-GUIARD (Louise Elisabeth était l’une des filles de Louis XV et Marie LESZCZYNSKA)

Cantos toscans …

 » Lumière juste érigée
En chemins, en collines,
En cyprès… choses lointaines
Ou proches que jamais
Nous n’avons révélées,
Faute de mots exacts
Et d’un cœur transparent. « 

 » Le carré lumineux de la fenêtre
capte les lointaines courbes du dehors :
ligne de crête hérissée de cyprès,
ourlet des nuages rompus par un aigle…
Dedans, on reste coi, sûr que tout est dit,
que rien ne sera dit. Pourtant ce moment
infini que seul un œil fini voit. »

Poèmes de François CHENG (Écrivain, poète et calligraphe français (naturalisé en 1971), membre de l’Académie française – Textes extraits de son recueil Cantos toscans)