» Aux confluents du Grand Canal, du large canal de la Giudecca, face au bassin de San Marco, sont les nefs de la Douane de mer. Dogana : le mot vient du persan diwàn , conseil des ministres, puis, par extension, livre des Édits. » A la porta, zoé chiamato in loto lenguazo al divan » note Sanudo le chroniqueur dans ses Diiari . Venue de l’Orient, de l’empire Ottoman, de Byzance, la Dogana retient, dans ses entrepôts, les rumeurs des routes de la Soie, des chargements des ports exotiques, les claquements des voilures, les grincements des mâtures. Il est une douane de terre, près du pont du Rialto, pour les marchandises arrivant de la terre ferme, produits familiers, coutumiers, tout-venant de la consommation. Mais la Douane de mer, c’est une autre histoire ! C’est l’Orient qui vient à l’Occident, c’est la fortune lointaine de la République qui pénètre dans son coeur, en son noyau, c’est la concentration, en un seul lieu, de la puissance tangible, palpable, visible, de ces vénitiens durs au travers de ces marchands et négociants, dont les palais splendides abritent aussi les entrepôts, les magasins, tournés vers le canal par l’ample porte d’eau.
Le triangle de la Douane de mer, son dessin pur et simple, résume l’esprit de Venise en ses temps de gloire, fait d’efficacité, d’organisation, d’échange, et de l’immense orgueil du travail bien fait. La Douane de la mer n’a rien d’un bâtiment vantard, voyant, chargé de proclamer la puissance monumentale de sa ville. Elle a été construire pour faire son travail de douane, recevoir des bateaux, réceptionner et entreposer les marchandises, ni plus ni moins.
La Pointe de la Dogana est une pensée de pierre qui fait éprouver à qui la contemple, d’où qu’elle soit regardée, la certitude qu’il existe pour chacun une juste place en ce monde, qu’il est possible de découvrir sa place et que ce jour-là la vie deviendra aussi simple, évidente et sereine que l’est son triangle. Benoni a construit un bâtiment destiné au travail, au commerce, à la circulation des marchandises et de l’argent. Au contraire des symboles vénitiens du pouvoir, de la fête ou de la foi, ses murs demeurent presque exempts d’ornementations superflues, de statues, d’allégories, de figures, hormis des têtes de chevaux aux yeux vides, sous la ligne de saillie de la tour et des têtes de lions exécutées en haut-relief sur les clefs de voûte. Seul, à l’extrémité de la Pointe, le sommet de la petite tour carrée interprète la vastitude du monde. Deux atlantes de bronze soutiennent un globe terrestre doré surmonté par La Fortune qui tient une sorte de bouclier, à moins qu’il ne s’agisse d’une faucille en croissant de lune, et tourne au vent… » Dominique MULLER ( Journaliste, écrivain, romancière française – Extrait de son ouvrage L’eau au-delà de La Pointe. A la Douane de mer
Les premiers entrepôts sur la Pointe ont vu le jour au XIVe siècle – En 1418 fut édifiée la première Douane de mer. De 1677 à 1682 : construction de la nouvelle Douane de mer selon les plans de l’architecte Giuseppe BENONI. En 1835 le bâtiment sera restauré et modifié par Giovanni Alvise PIGOZZI – C’est en Avril 2007 que le Palazzo Grazzi , appartenant à l’homme d’affaires français François PINAULT, remporte la compétition qui avait été lancée pour faire de ce lieu un centre d’art contemporain. Cela a nécessité quatorze mois de travaux, de Janvier 2008 à mars 2009. L’architecte fut le japonais Tadao ANDO. L’inauguration aura lieu en Juin 2009 avec l’exposition Mapping the Studio
» La palla d’oro » avec La Fortune – Sculptée par Bernardo FALCONI