« Quand le raisin est mûr, par un ciel clair et doux,
Dès l’aube, à mi-côteau, rit une foule étrange :
C’est qu’alors dans la vigne et non plus dans la grange,
Maîtres et serviteurs, joyeux, s’assemblent tous.
A votre huis, clos encor, je heurte. Dormez-vous ?
Le matin vous éveille, élevant sa voix d’ange :
Mon compère, chacun, en ce temps-ci, vendange.
Nous avons une vigne : eh bien ! Vendangeons-nous ?
Mon livre est cette vigne, où, présent de l’automne,
La grappe d’or attend, pour couler dans la tonne,
Que le pressoir noueux crie enfin avec bruit.
J’invite mes voisins, convoqués sans trompettes,
A s’armer promptement de paniers, de serpettes.
Qu’ils tournent le feuillet : sous le pampre est le fruit. » » Aloysius BERTRAND (Poète, dramaturge et journaliste français – Extrait de son recueil Œuvres complètes)
« Acis et Galatée avec Polyphème » – Fontaine Médicis / Jardin du Luxembourg à Paris – A l’origine c’était une grotte-portique commandée par la reine Marie de Médicis à l’intendant général des eaux et fontaines de Paris, sous le règne de Henri IV : Tommaso Francini(Thomas Francine en français) un architecte florentin. Elle souhaitait avoir quelque chose qui puisse lui rappeler les jardins de Boboli de Florence. Le groupe, sculpté de trois personnages, fut l’œuvre de l’architecte français Auguste Ottin lors de la restauration du lieu en 1852. La fontaine, quant à elle, fur réalisée en 1862 par Alphonse de Gisors.
» La légende d’Acis et Galatée prend place dans le livre XIII des Métamorphoses d’Ovide aux vers 792/900. Acis, bel adolescent de seize ans, fils du dieu Faunus et de la nymphe Simaethis, et Galatée, fille du dieu Nérée et de la nymphe Doris, s’aiment d’un amour réciproque. Mais le cyclope Polyphème, géant monstrueux et sauvage, fils de Poséidon et de la nymphe Toossa, s’est violemment épris de Galatée et la recherche sans cesse. Un jour qu’elle se trouve en compagnie d’Acis à l’abri d’un rocher, Polyphème, du haut de la montagne, après avoir joué de la flûte de Pan, fait entendre un long discours de séduction à destination de l’insensible jeune fille. Il y chante la beauté farouche de Galatée, énumère tous les présents qui lui reviendraient si elle consentait à l’aimer, toute sa propre beauté, et lance de terrible menaces envers son rival. A la fin du discours, alors qu’il s’était mis à arpenter avec fureur les forêts, Polyphème aperçoit soudain le couple d’amants. Ses cris furieux font fuir Galatée qui plonge dans l’eau voisine. Acis fuit lui aussi, mais Polyphème le poursuit et lance sur lui un énorme rocher qui l’écrase totalement. Galatée obtient du destin la métamorphose d’Acis : le sang qui s’écoulait du dessus du rocher, se transforma en un fleuve qui prendra son nom. » Marcel DITCHE (Professeur de Lettres, membre de la commission nationale du concours de l’agrégation de Lettres modernes, spécialiste en littérature – Extrait de Eros noir dans la légende d’Acis et Galatée/Ovide les Métamorphoses XIII-722/900 publié en 2015 dans la revue Silène.)
Acis et Galatée, chef-d’œuvre remarquable de Lully, opéra sous forme de pastorale héroïque, fut créé au château d’Anet, dans la galerie de Diane, en 1686, puis plus tard au Palais Royal. Compte tenu que Quinault, le librettiste favori de Lully, était gravement malade et que leur collaboration s’était donc arrêtée, le duc de Vendôme va choisir un auteur dramatique de l’époque : Jean Galbert de Campistron. Ce dernier s’inspirera des Métamorphoses d’Ovide
(Vidéo : Ouverture/Prologue – Les MUSICIENS DU LOUVRE – Direction Marc MINKOWSKI)
C’est un opéra vraiment éclatant, intense, inventif, audacieux, génial, irrésistible, merveilleux, comme a su l’être, du reste, ce compositeur. Il fut dédié au Dauphin (le prologue a été composé à son intention) et obtiendra un énorme succès lors de sa création. Sa légèreté du départ n’est qu’une apparence, car il va devenir beaucoup dramatique par la suite.Les arias et récitatifs sont magnifiques tout comme le sont les ensembles et les chœurs. La Passacaille de l’acte III , représentante de l’amour sublimé idéalisé, est tout simplement incroyable.
( Vidéo : Passacaille Acte III » Sous les lois l’amour veut qu’on jouisse » – Mireille DELUNSCH (Soprano) – Monique SIMON (Mezzo-soprano) – Chœur et musiciens Les MUSICIENS DU LOUVRE – Direction Marc MINKOWSKI
Oublié avec les siècles passant, il sera ressuscité en 1930 à Amsterdam par le musicien et chef français Pierre Monteux. Lors des célébrations du tri-centenaire de la naissance de Lully, il réapparaîtra parmi d’autres œuvres, mais une fois les festivités terminées, on ne peut pas réellement dire qu’il reviendra sur le devant de la scène, jusqu’au jour où Marc Minkowski, à la direction des Musiciens du Louvre, nous permet de redécouvrir à nouveau cet opéra fascinant, et ce pour notre plus grand bonheur;