Papillons & Fleurs …

 » Papillons et fleurs, créatures d’apparat qu’unissent de subtiles correspondances. Les botanistes n’ont-ils pas baptisé une famille entière de plantes du nom révélateur de Papilionacées ?  Pois, luzerne, trèfle, vesce, figurent parmi ces adeptes du trompe l’œil. Leurs corolles ambiguës sont flanquées de deux pétales courbes que l’on désigne par le terme d’ailes. La fleur est un étendard vivant.  Un appel coloré à l’adresse des insectes butineurs. Ses pétales s’assemblent comme les panneaux d’un polyptyque. Le papillon est, lui aussi, en constante représentation. Ses ailes, il les a sacrifiées à cette impérieuse exigence. Trop larges, trop plates, elles ne permettent qu’un vol hésitant, chaotique, qui est le jouet du moindre vent. Ce n’est plus une voiture, c’est un ensemble offert au regard. Une miniature faite de milliers d’écailles colorées, imbriquées comme les tuiles d’un toit. Quel bénéfice le papillon tire t-il de ces figures obstinément retranscrites génération après génération ? Livrées de camouflages, couleurs d’avertissement des papillons vénéneux signalant aux prédateurs leur caractère incomestible, couleurs mimétiques d’espèces comestibles imitant les insectes vénéneux pour bénéficier d’une protection usurpée, ces interprétations ingénieuses n’épuisent pas toute la richesse de ces débordements picturaux. La vie est un sphinx qui aime jouer aux énigmes. » Claude NURIDSANY (Réalisateur, photographe, écrivain – Extrait de l’ouvrage L’éloge de l’herbe –Les formes cachées de la nature – avec la collaboration de Marie PÉRENNOU)