SIGNAC-Les harmonies colorées …

«  Le divisionnisme est le système d’harmonie, une esthétique plutôt qu’une technique. Le point n’est qu’un moyen. Diviser c’est rechercher la puissance et l’harmonie de la couleur en représentant la lumière colorée par des éléments purs et en employant le mélange optique de ces éléments purs, séparés et dosés, selon des lois essentiels du contraste et de la graduation » …..  » Paul SIGNAC

 » J‘éprouve toujours une émotion très peintre devant les toiles de Signac. J’aime les regarder de tout près autant que de loin. Il y a là des jeux de teintes qui ravissent comme des heureux assemblages de gemmes et qui sont à lui seul. » Théo VAN RYSSELBERGHE

Paul SIGNAC 1863/1935

Le musée Jacquemart-André nous propose une très intéressante exposition intitulée  » SIGNAC-Les Harmonies colorées, jusqu’au 19.7.2021. Elle est présentée de façon chronologique, en différentes salles, et retrace la vie et le travail de celui qui fut un peintre novateur, un maître du paysage, un dessinateur (plume et encre de Chine) , un graveur, un lithographe, un grand théoricien : Paul SIGNAC. Ce dernier est accompagné par des toiles de certains de ses collègues néo-impressionnistes comme par exemple : Charles Edmond Cros, Théo Van Rysselberghe, Maximilien Luce, Achille Laugé, Georges Lemmen, Louis Hayet, Léon Pourtau, Georges Lacombe, Camille Pissarro(le Ier à rejoindre Seurat et Signac) ou son frère Lucien Pissarro etc…

 » La cueillette des pommes  » 1886 – Camille PISSARRO (Ohara Museum of Art/Kurashiki)
 » La toilette  » 1887 Maximilien LUCE (Association des amis du Petit Palais/Genève)
« Le moulin du Kalf à Knökke » 1894 – Théo VAN RISSELBERGHE (Collection particulière)
 » Au café  » 1887/88 Louis HAYET (Collection particulière)
 »L’arbre en fleurs » 1893 Achille LAUGÉ (Collection particulière)
« Scène de plage » 1890/93 Léon POURTAU (Collection particulière)

Les harmonies colorées : Pourquoi cet intitulé ? D’une part parce que toute sa vie, Signac à été à la recherche de l’harmonie : visuelle dans ses œuvres, sociale dans ses pensées ( » justice en sociologie, harmonie en art : même chose » ) . De plus, il n’a eu cesse d’étudier, voir explorer toutes les possibilités que la couleur pouvait lui apporter. Et enfin, parce que ce titre a aussi un rapport avec l’un de ses tableaux, peint en 1894/1895 à savoir Au temps d’harmonie, une toile de très grand format, qui représente ses idéaux politiques et philosophiques. Elle est basée sur un texte anarchiste de Charles Malato (journaliste anarchiste franco-italien, militant libertaire, écrivain ). plus exactement d’une phrase extraite d’un texte Le rêve d’Hermanus qui fut publié dans une revue anarchiste. Le tableau est désormais accroché dans l’escalier d’honneur de la Mairie de Montreuil.

 » Au temps d’harmonie  » (L’âge d’or n’est pas dans le passé, il est dans l’avenir) 1894/95 (Mairie de Montreuil)

L’expo nous parle de pointillisme, de divisionnisme, de néo-impressionnisme …. Alors il faut savoir que pointillisme + divisionnisme = néo impressionnisme, un terme qui a été donné par le critique d’art Félix Fénéon. Il regroupe deux techniques (ou méthodes) picturales : le pointillisme et le divisionnisme. La première c’est l’application de petites touches multicolores posées sur la toile, et la seconde la juxtaposition de différentes teintes au travers de formes qui ressemblent à des points ou des virgules.

Points détails tableau Signac
Points en virgule détail Tableau Signac
« Portrait de Mr Félix Fénéon » 1890 Paul SIGNAC (Museum of Modern Art de New York)

Le néo impressionnisme est né et s’est développé sous la IIIe République. Il va durer de 1886 à 1908 – Ceux qui l’adopteront furent, en majorité, des anarchistes. Chacun à son niveau, ils ont, pas toujours mais souvent quand même, traduit leurs convictions au travers de leurs tableaux.

 « Le peintre anarchiste n’est pas celui qui représentera des tableaux anarchistes mais celui qui, sans souci de lutte, sans désir de récompense, luttera de toute son individualité contre les conventions bourgeoises et officielles par un apport personnel. Le sujet n’est rien, ou du moins qu’une partie de l’œuvre d’art, pas plus important que les autres éléments, couleurs, dessin, composition » P.S.

Le terme pointillisme a été inventé par des critiques d’art. Certains avancent le nom de Arsène Alexandre. Ils l’ont fait non par bienveillance pour définir ce travail, mais pour se moquer, avec dédain, des toiles qu’ils avaient devant eux, et ridiculiser ceux qui en étaient les auteurs. Paul Signac n’appréciera absolument pas ce nom et il répondra :  » Le néo-impressionnisme ne pointille pas, il divise. Et diviser implique garantir tous les bienfaits de la lumière. »

Pour lui, en effet, les couleurs se divisent en partant de règles bien précises et ce afin qu’une toile prenne forme. C’est donc ce que l’on appelle le divisionnisme, à savoir la science de la division des couleurs. En ce qui le concernait, Signac n’utilisait que des couleurs primaires : jaune, rouge, bleu, ainsi que des couleurs secondaires tels que le vert, l’orange et le violet. Selon les principes du physicien Ogden Rood sur la vision des couleurs, il affirmait que le mélange se faisait dans l’œil de celui ou celle qui regarde la toile. Plus on s’éloigne du tableau, et plus on «  mélange  » les couleurs.

La majorité des peintres qui adhéreront au néo-impressionnisme, ont tous été attachés, un jour, à l’impressionnisme. Ils aiment la peinture en plein air, les paysages, les portraits, le ciel, la mer, la lumière, la couleur etc… Mais pour autant il y a des différences : le néo-impressionnisme ne s’est pas associé à la spontanéité et l’éphémère de l’impressionnisme et il n’a pas vu le mouvement comme lui. Par ailleurs, les impressionnistes se sont vivement intéressés à la couleur, mais les néo-impressionnistes ont davantage été concentrés sur les recherches scientifiques se référant à la couleur et la façon dont l’œil pouvait la capter . De plus, dans l’impressionnisme le peintre mélange les couleurs sur la palette et les applique sur la toile., et dans l’autre ce sont des petits points de différentes couleurs qui sont déposés, de façon très méthodique, sur la toile.

Elle a été développée en 1886 par deux peintres : Georges Seurat et Paul Signac, lesquels avaient en tête de révolutionner l’art de la peinture. On peut dire qu’ils ont réussi parce qu’un jour leurs travaux ouvriront non seulement la route au fauvisme, mais le livre, ou plutôt le véritable manifeste légitimant le mouvement néo-impressionnisme, rédigé par Signac ( D’ Eugène Delacroix au néo-impressionnisme -traduit en plusieurs langues) attirera, quelques années plus tard, les peintres de l’art abstrait comme Kandinsky ou Klee ( pour ne citer qu’eux). Ils vont s’en inspirer et rendront hommage au travail de Paul Signac.

 » Portrait de Paul Signac » Vers 1925 (mine de plomb sur papier) – Maximilien LUCE (Collection particulière)
« Portrait de Georges Seurat » 1890 (Crayon Conté sur papier) Maximilien LUCE (Collection particulière)

Signac a rencontré Seurat en 1884. Sa technique et ses idées picturales vont lui plaire et c’est sous l’influence de Seurat que Signac va laisser sa façon impressionniste de peindre, pour se tourner vers ces petites points de couleurs juxtaposés. Signac n’en a pas été l’inventeur, mais il en sera le principal théoricien. A la mort de Seurat il deviendra le chef de file du mouvement néo-impressionniste.

Paul Signac fut un autodidacte. Il n’a absolument pas apprécié le côté purement traditionnel de son art, ne fréquentera pas d’école comme par exemple celle des Beaux Arts, préférant se rendre au Louvre et copier. Il a été, par ailleurs, un collectionneur, possédant des œuvres de Monet, Renoir, Pissarro, Degas, Van Gogh, Cézanne, Luce, Matisse, Cross, Seurat, Guillaumin, Van Rysselberghe … j’en oublie certainement (Le musée d’Orsay proposera d’ailleurs à l’automne 2021 une exposition sur cette facette de Signac)

C’est un anticonformiste, un indépendant d’esprit, un rebelle qui ne redoutera pas, dans sa jeunesse, de soutenir la cause anarchiste, voire même l’aider financièrement dans les publications de tous ceux qui en faisaient partie. L’anarchisme représente pour lui l’aboutissement d’une société égalitaire et libre. Un homme de son temps, avec un tempérament assez expansif, doué pour la communication, que beaucoup reconnaissent comme étant brillant, intelligent, convivial, fédérateur, exigeant, avec un grand sens de l’amitié.

Surnommé le St Paul du néo impressionnisme par Thadée Natanson dans la Revue Blanche parce qu’il était toujours en train de convaincre ses collègues du bien fondé de ses idées picturales.

Côté vie privée il s’est marié en 1892 avec Berthe Roblès, modiste, une cousine de Camille Pissarro. Ce fut un couple fusionnel et très uni. Elle a été la femme, l’amante, la muse, celle qui savait trouver les mots justes pour l’encourager et le rassurer. Le seul point noir de leur union fut qu’ils ne purent avoir d’enfant. Un jour, ils vont devenir amis avec un couple de voisins Pierre et Jeanne Selmershein. Lui est architecte, elle peintre. Ils ont trois enfants. Coup de foudre entre Paul et Jeanne. Elle divorcera en 1912. En 1913 naîtra Ginette, fruit de sa relation avec Paul. Il ne l’adoptera que 15 ans plus tard. Elle sera sa légataire. Paul et Jeanne s’installeront à Antibes et Berthe continuera de vivre dans la villa La Hune qu’elle occupait autrefois avec son mari à St Tropez.

.Paul et Jeanne à Antibes en 1913

Paul continuera d’entretenir des liens amicaux avec Berthe. Il lui écrira quotidiennement durant de très longues années. Compte tenu du fait qu’ils ne divorceront jamais, Berthe était donc légalement « la mère » de Ginette. En tous les cas, elle ne sera pas jalouse de cette enfant et lui apportera beaucoup d’affection.

La petite-fille de Paul Signac, Françoise Cachin fut historienne de l’art, co-fondatrice et directrice du musée d’Orsay.

Il est né à Paris en 1863, fils unique dans une famille de commerçants. Son père meurt lorsqu’il est très jeune. Il sera alors élevé à Asnières par sa mère . Elle va beaucoup le choyer et le laissera s’épanouir comme il l’entend. Elle aurait souhaité qu’il devienne architecte, mais après avoir hésité entre une carrière d’écrivain ou celle de peintre, il optera pour la seconde. C’est un jeune homme fougueux et impétueux qui se rend à Paris, dans le quartier de Montmartre.

 » La palette aux Tuileries  » 1882/83 Paul SIGNAC (Collection particulière)
« Saint-Brieux/Le Bléchet » 1885 – Paul SIGNAC (Collection particulière)

De son propre aveu, il est devenu peintre en découvrant le travail impressionniste de Claude Monet. Sa liberté avec la peinture en extérieur le fascine. Il lui écrira souvent pour qu’il lui prodigue des conseils, essayer de comprendre avec lui les contrastes, le sens de la couleur etc… Monet lui répondra … Pas immédiatement, mais il le fera. On peut donc affirmer que les toiles des débuts de Signac furent fortement influencées par Monet.

 » C’est de ce jour là que date notre amitié. Elle a duré jusqu’à sa mort. Je l’aimais et le vénérais comme un père. « Signac parlant de Monet.

«  Franchement voici ma position : je peins depuis deux ans et mes seuls modèles sont vos propres œuvres. J’ai suivi le merveilleux chemin que vous avez tracé pour nous. J’ai toujours travaillé régulièrement et consciencieusement, mais sans conseil ni aide, car je connais aucun peintre impressionniste qui puisse me guider, vivant comme je suis dans un environnement plus ou moins hostile à ce que je fais. Donc je crains de me perdre et vous prie de bien vouloir me laisser venir vous voir, ne serait-ce que pour une courte visite. Je serai heureux de vous montrer cinq ou six études. Peut-être pourriez-vous me dire ce que vous en pensez et me donner les conseils dont j’ai tant besoin, car le fait est que j’ai les doutes les plus horribles ayant toujours travaillé seul, sans professeur, sans encouragement ni critique. » Paul Signac dans une lettre adressée à Claude Monet en 1880

Premier atelier en 1881 et première exposition au Salon des Indépendants en 1884. Il s’agissait d’un Salon sans jury. De nombreux peintres furent refusés et décidèrent de créer leur propre Salon, la même année, sans jury. Signac recevra une invitation. Il s’y rendra et c’est là qu’il rencontrera Georges Seurat. Non seulement le travail de ce dernier lui plait, mais ils vont devenir amis. On peut dire que Seurat fut son âme sœur, un ami fidèle, un confident. Toutefois, l’un est assez exubérant (Signac) et l’autre (Seurat) beaucoup plus réservé, introverti.

« Un dimanche après-midi sur l’île de la Grande Jatte  » 1884/1886 – Georges SEURAT (The Art Institute of Chicago)

En peinture ils sont passionnés par la couleur : Seurat porte un grand intérêt à l’harmonisation des couleurs, des lignes, des contrastes. Signac, de son côté, se plonge dans l’étude des principes des lois optiques et de la couleur. Ils vont mettre leurs travaux en commun avec un objectif en tête : révolutionner l’art de la peinture. Leur méthode : la division des couleurs. Signac le voit davantage comme une esthétique, une philosophie.

 » Arc-en-ciel à Venise » 1905 – Paul SIGNAC (Collection particulière)
« Les Andélys soleil couchant » 1886 Paul SIGNAC (Collection particulière)
« Avant du Tub Opus 176 » 1888 Paul SIGNAC (Collection particulière)

Les impressionnistes étaient partis à la conquête de la nature et de la lumière. Seurat et Signac vont vouloir faire vibrer la nature au travers de leur technique novatrice. Pour ce faire, comme je l’ai expliqué au début de cet article, ils vont approfondir leurs travaux en se basant sur des théories et des traités concernant le mélange optique des couleurs, écrits par des scientifiques ou chimistes tels que Michel Eugène Chevreul, Ogden Rood ou Charles Blanc notamment. Ces hommes affirmaient que l’on pouvaient associer des couleurs les unes aux autres en les positionnant à partir d’une figure (un cercle par exemple) ce qui permettait d’aboutir à l’association de couleurs opposées, que chaque couleur diffusait un ton complémentaire autour d’elle (c’est ce que l’on appelle la complémentarité) ; des oppositions qui amenaient à des contrastes assez forts, des accentuations, de l’intensité, parce que les couleurs étaient posées là où finalement on ne les attendait pas : un ciel, une mer, un champ ou autre dans une couleur qui n’était pas celle de son origine.

Attention, il ne faut pas penser qu’il suffit juste de poser des petits points ronds, carrés, ou en virgules, sur une toile. C’est un travail très rigoureux, exigeant, qui nécessite d’être méticuleux, précis, d’avoir de la discipline mais aussi une grande patience car il y a un temps d’attente très long entre chaque pose d’une touche de couleur. Il faut bien adapter les lignes, les clairs-obscurs, les couleurs, selon l’image que l’on souhaite obtenir. Les lignes, elles aussi, ont de l’importance car elles traduisent quelque chose selon qu’elles sont ascendantes ou descendantes, intermédiaires etc… Chaque ligne a son propre ton. Ce jeu entre les couleurs et les lignes, a pour but de transférer sur la toile les ressentis, les émotions, les sensations du peintre, pour créer une œuvre pleine de poésie.

Cette œuvre naîtra ensuite sous l’œil de ceux qui vont l’observer : plus on s’en éloigne, plus on mélange les couleurs et on en saisit tous les détails. Plus, en effet, on s’écarte de la toile, et plus les petits points révèleront la composition d’une scène. C’est magique !

A la mort prématurée de Seurat à l’âge de 31 ans, Signac devient en 1891 le chef de file du néo-impressionnisme. Il le fera évoluer, attirant d’autres peintres vers sa technique. Il doit faire face également à de très nombreuses critiques sur le mouvement, mais s’accroche pour qu’il continue d’exister . et publiera en 1899 ce livre cité plus haut et qui restera dans les annales de la peinture : D’Eugène Delacroix au néo-impressionnisme. Un ouvrage qui ne va pas plaire à tout le monde. Traduit en plusieurs langues, il va faire de nombreux émules en Allemagne, Italie, Russie, Hollande, Pays-bas.

Il avait alors besoin de repos et de réflexion. Il part sur l’Olympia, un bateau construit au chantier Kerenfors à Roscoff, pour la Bretagne, puis pour la Méditerranée, plus précisément dans le Var, à Saint-Tropez, Il s’installe dans ce charmant petit village de pêcheurs et il y passera tous ses étés de 1892 à 1913. Il acquiert une maison, la villa La Hune. Il invitera de nombreux peintres à venir le retrouver dans cette maison.

 » Dans le fond les silhouettes des Maures et de l’Estérel. J’ai là de quoi travailler toute mon existence. C’est le bonheur que je viens de découvrir !  » P.S.

 » Fontaine des Lices à Saint-Tropez « 1895 – Paul SIGNAC (Collection particulière / Le tableau sert l’affiche)

Les années qui suivront seront consacrées à des tableaux sur Saint-Tropez. Le reste de son temps, il le consacre à la lecture, au repos près de sa famille et de ses amis.

Signac fut un grand amoureux de mer, de reflets sur l’eau, de paysages maritimes, et de bateaux. Tous ceux qui le connaissaient savaient que la mer était une véritable passion. Son intérêt pour la voile avait commencé quand sa famille s’est installé en bords de Seine à Asnières et il s’est intensifié avec les conseils de Gustave Caillebotte – L’eau, la mer furent ses sujets préférés. Ils couvrent 80 % de sa production picturale.

 » Je suis un yachtman pratiquant. Jusqu’en 1915 j’ai fait partie du Yacht-Club de France. J’ai, à bord de mes bateaux que j’ai toujours menés moi-même, fait de nombreuses croisières et gagné de nombreux prix en régates. Par deux fois j’ai mené un 5 et un 12 tonneaux de Bretagne en Méditerranée. Je ne donne ces détails que pour montrer que ma vie et mon art ont été dédiés en grande partie à la mer. » P.S.

« Mr Paul Signac à la barre de l’Olympia » 1896 – Théo VAN RYSSELBERGHE (Collection particulière)
 » Signac et ses amis en barque « 1914/1925 – Pierre BONNARD (Kunsthaus de Zurich)

Il a possédé une trentaine de bateaux (dessinés par ses soins pour un grand nombre d’entre eux) allant de la simple barque à de très gros voiliers. Ces derniers lui ont permis d’effectuer des voyages par la mer, dans de très nombreux pays et à chaque port, de réaliser des magnifiques esquisses qui, une fois rentré, devenaient des tableaux.

En 1892, il se tournera vers l’aquarelle. Il aime son côté pratique, rapide, peu encombrant (donc facilitant les voyages). Pour cet impatient né, c’est une technique parfaite. Elle va le passionner. Avec l’aquarelle, il se lance dans autre chose : il ne pointille pas, il ne divise pas. Il sépare les couleurs, fait en sorte de ne pas les mélanger et ne couvre pas pas la totalité de sa toile blanche afin de la rendre plus éclatante encore.

 » Avignon Matin Palais des Papes » (Aquarelle, plume et encre de Chine) 1909 – Paul SIGNAC (Collection particulière)
 » Antibes (Aquarelle, plume et encre de Chine) 1910 Paul SIGNAC (Collection particulière)

Côté peinture à l’huile, les années passeront, plus sa technique évoluera : les petits points d’autrefois laisseront la place à des touches plus carrées. Il va persévérer dans son approfondissement et son exigence sur la couleur et ses répartitions sur la toile, et publiera en 1899 ce livre cité plus haut et qui restera dans les annales de la peintre : De Eugène Delacroix au néo-impressionnisme. Pourquoi Delacroix ? Tout simplement parce que ce fut le premier à donner à la couleur une grande importance et une valeur égale à celle accordée au dessin.

Il sera nommé Président des artistes indépendants en 1908 et le restera jusqu’en 1935, année de sa mort.

En 1914 , lui qui aimait voyager avec son bateau et peindre dans les ports, ne pourra plus le faire en raison de la première guerre mondiale . Ce conflit va profondément le déprimer, d’autant qu’il était connu pour être un pacifiste. Il ne peut peindre, mais il lit beaucoup, Stendhal notamment.

Sa nomination en tant que Peintre officiel de la Marine en 1915 va lui permettre de reprendre ses voyages sur la mer et peindre dans les ports . Son dernier cycle sera d’ailleurs intitulé Ports de France qui fut exécutée entre 1929 et 1931, sous le parrainage de Gaston Lévy, un homme d’affaires, fondateur de la chaine Monoprix. Pour réaliser les 200 aquarelles de cette série, il va acquérir une petite maison à Barfleur en Bretagne.

« Dunkerque » (Aquarelle et mine de plomb) 1930 – Paul SIGNAC (Collection particulière)
 » Villefranche-sur-mer » (Aquarelle et mine de plomb) 1931 Paul SIGNAC (Collection particulière)
« Saint Nazaire » 1929 (Aquarelle et mine de plomb) Paul SIGNAC (collection particulière)
 » Saint-Malo les voiles jaunes » 1929 (Aquarelle et mine de plomb) Paul SIGNAC (Collection particulière)

Signac est décédé d’une septicémie en 1935. Il sera incinéré , puis enterré trois jours plus tard au cimetière du Père Lachaise à Paris.

Le fonds de Paul Signac est géré, depuis 2011, par son arrière-petite-fille : Charlotte Liébert-Hellman.