Les Symphonies de Piotr I.TCHAÏKOVSKY …

«  Si vous me demandez si une symphonie obéit à un programme déterminé, je réponds d’ordinaire que non. Mais à dire vrai le problème n’est pas si simple. Comment faire exprimer les sentiments imprécis qui naissent quand on compose une partition orchestrale sans un programme défini ? C’est un développement purement lyrique, une confession musicale de l’âme qui, pleine d’impressions extérieures et intérieures, surgit pour venir en aide aux sons, comme le poète vient en aide aux vers. A la différence près que la musique dispose d’un vocabulaire incomparablement plus délicat et plus puissant pour traduire la complexité de notre vie spirituelle. Et si vous me demandez si je respecte les formes traditionnelles, je répondrai que oui et non. Dans une symphonie j’adopte la structure classique dans ses grandes lignes, ainsi que pour l’ordre des mouvements. Mais je considère que toutes les licences sont permises pour les détails ; il faut ne tenir compte que du dénouement naturel, spontané, de l’idée musicale en elle-même. » Piotr I.TCHAÏKOVSKY dans une lettre à sa mécène et protectrice la Comtesse Nadezhda VON MECK)

Tchaïkovsky a écrit six Symphonies à des époques différentes, et si l’on s’en tient aux propos exprimés ci-dessus, il est évident que pour les composer, il a mené un combat entre le musical et le psychologique. C’est en fait la personne tourmentée qu’il n’a cessé d’être tout au long de sa vie.

Symphonie N°1 Op.132 dite Rêve d’hiver : Elle date de 1866. C’est un chef-d’œuvre tout à fait révélateur de ce grand talent musical dont a souvent fait preuve ( pour ne pas dire toujours) ce merveilleux compositeur pour ce qui traite de l’orchestration et de la mélodie.

Une partition qui est un petit miracle de beauté poétique, lumineux, lyrique, et dont il a souvent dit qu’il éprouvait une immense tendresse pour elle.

Vidéo : Symphonie N.1 Op.13 – ORCHESTRE DE LA RADIO NATIONALE DE MOSCOU – Direction Gennady ROZHDESTVENSKY)

Symphonie N°2 Op.17 dite La petite Russie : Elle date de 1872 (révisée en 1880) – Elle est un petit clin d’œil, un hommage rendu au Groupe des Cinq formé par Mili Balakirev, mais aussi au folklore ukrainien ( un pays dans lequel il avait séjourné)

C’est une très belle Symphonie, énergique, passionnée, avec de très belles couleurs orchestrales et pour laquelle il disait s’être donné à fond.

(Vidéo : Symphonie N°2 Op.17 – Valery GERGIEV à la direction de l’ORCHESTRE SYMPHONIQUE DU MARIINSKY)

Symphonie N°3 Op.29 dite La Polonaise : Elle date de 1875 et doit son nom au 4e mouvement (Tempo di Polacca/Tempo de Polonaise)

Elle débute assez lentement, quasi solennelle, puis se fait plus fougueuse et poursuit sa route en évoluant de façon posée, réfléchie, avec des mouvements mélancoliquement tristes.

(Vidéo : Tempo di Polacca Symphonie N.3 Op 29 / Igor MARKEVITCH à la direction du LONDON SYMPHONY ORCHESTRA)

Symphonie N°4 Op.36 : elle date de 1877. C’est la première dans laquelle le thème du destin , si cher à Tchaïkovsky, est très présent. Il le sera dans les deux autres qui suivront. Il traversait, à cette époque, des moments très douloureux, difficiles, dus à l’échec de son désastreux mariage avec l’une de ses élèves Antonina Milyukova.

Elle est dédiée à celle qui fut sa confidente et mécène à savoir la comtesse Von Meck. C’est une partition intense, contemplative, on pourrait dire  » autobiographique « . Tout comme peut l’être le destin, elle traduit le drame mais aussi l’espoir des jours meilleurs. Ce sera un échec qui l’amènera à une forte dépression nerveuse, laquelle lui fera abandonner l’écriture symphonique. Il n’y reviendra que dix ans plus tard.

(Vidéo : Symphonie N.4 Op.36 – Herbert V.KARAJAN à la direction de l’ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE BERLIN)

Symphonie N°5 Op.64 : sera crée sous sa direction en 1888 à Saint-Pétersbourg. Dix ans s’étaient écoulés et le revoilà qui revient avec une œuvre absolument superbe, qui reprend le thème du destin, avec le côté soumis, résigné, mais qui va de l’avant malgré toutes les interrogations et les doutes que la vie met souvent devant soi.

Dans son ensemble, elle baigne dans un climat plutôt sombre, solennel, martial, mais infiniment émotionnel malgré tout, notamment avec le sublime Andante. Elle laisse entrer, de temps à autre ( comme le destin) des petites éclaircies heureuses, lumineuses, pleines de charme. Elle a également parfois des accents de valse mélancolique et se termine puissante et majestueuse.

(Vidéo : Symphonie N.5  » Andante  » – Valery GERGIEV à la direction de l’ORCHESTRE SYMPHONIQUE DU MARIINSKY)

Symphonie N°6 Op.74 dite La Pathétique : un titre qui lui fut donné par le frère du compositeur, Modeste, car il la trouvait triste et tourmentée. Elle date de 1893, écrite (dans les larmes disait-il) au retour d’un voyage à Paris. Il aura le bonheur de la diriger en octobre et décèdera peu de temps après.

Elle est très forte émotionnellement parlant, cohérente, intensément dramatique, mélancolique, sentimentale, prodigieusement belle dans l’orchestrale et la rythmique.

(Vidéo : Symphonie N.6 Op.74 – Yevgeny MRAVINSKY à la direction de l’ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE LENINGRAD)

Mon jardin sous mes mots …

‘ Roses, jasmins, iris, lilas, volubilis,
cerisiers du Japon et jeunes arbousiers,
colorant le matin de leurs chants printaniers
adornent mon jardin de vivants ex-libris.

Abeilles et frelons s’y disputant les lys,
piétinent les pistils sans aucune pitié,
alors que, s’échappant des pages d’un herbier,
un papillon de nuit dévore un myosotis.

Solitaire et pensif, un arôme somnole
sous le dais argenté d’un antique olivier,
dont l’ombre de satin imite l’Acropole.

Dans mon jardin aussi, le soleil a planté
une pure fontaine, comme un encrier,
où je plonge ma plume et bois l’éternité. » Francis Etienne SICARD (Poète et écrivain français / Son poème Mon jardin sous mes mots a été écrit en 2009 )

Tableau de Antonietta VARALLO

La couleur …

 » L’étude de la couleur : j’ai toujours l’espoir de trouver quelque chose là dedans. Exprimer l’amour de deux amoureux par un mariage de complémentaires, leur mélange et leurs oppositions, les vibrations mystérieuses des tons rapprochés. Exprimer la pensée d’un front par le rayonnement d’un ton clair sur un fond sombre. Le coloriste est celui qui, voyant une couleur dans la nature, parvient à bien l’analyser et à dire, par exemple : ce gris-vert est du jaune avec du noir et presque pas de bleu etc…C’est aussi celui qui sait faire sur la palette les gris de la nature. » Vincent VAN GOGH (Peintre et dessinateur néerlandais)

Palette de Vincent VAN GOGH

A la découverte de Frans HALS …

 » Frans Hals était essentiellement un peintre de portraits. Nul n’a senti, comme lui, la nécessité, tout en demeurant vrai, sincère et précis, de faire passer dans l’apparence des choses, ou des gens, le frisson mystérieux de la vie. Nul n’a mieux compris qu’il n’était pas nécessaire, pour animer les figures, d’en transformer la ressemblance. Il a su laisser pressentir, par son exemple, que tous les objets palpables et visibles, animés ou non d’un souffle propre, se magnifient quand on leur donne leur valeur d’expression et que le problème de l’artiste est de la découvrir, de la mettre en lumière. En d’autres termes, l’intérêt d’une peinture réside moins objectivement dans la chose représentée que dans l’œil, le sentiment, le travail du peintre. Frans Hals ne s’inquiétait des souffrances, des joies des personnages dont il peignait les portraits, que dans la mesure où les traces de ces souffrances et de ces joies étaient empreintes dans les traits visibles de leurs physionomies. Il n’a pas mis dans son œuvre l’anxiété et la fièvre d’un Rembrandt, mais son esprit ne fut, néanmoins, pas flegmatique. » André FONTAINAS (Homme de Lettres, poète, écrivain et critique français)

Copie d’un autoportrait de Frans HALS , lequel datait de 1648 et 1650 – Une quinzaine de copie ont été faites –

Avant de vous parler de cet incroyable peintre, j’aimerai ouvrir une petite parenthèse sur l’époque dans laquelle il a travaillé, à savoir celle du Siècle d’Or de la peinture hollandaise (XVIIe siècle). En Juillet 1581, les sept provinces des Pays-Bas, autrefois placées sous l’autorité du roi Philippe II d’Espagne, obtiennent leur indépendance. Ce pays va acquérir une incroyable prospérité, une forte puissance maritime , un bel essor économique. Tout cela va incontestablement profiter aux artistes, à l’épanouissement de la culture, des arts et des Lettres. La haute bourgeoisie est assez riche pour faire travailler les peintres. Ils ne furent pas les seuls, car les riches paysans eux aussi achetaient, couvraient les murs de leurs confortables fermes de tableaux. On aimait les natures mortes, les paysages, les scènes de genre, et surtout on raffolait des portraits. La production picturale de cette période est très importante.

Hals a été un très talentueux portraitiste de ce siècle d’or hollandais, un merveilleux coloriste, un dessinateur génial, l’inventeur d’une technique picturale d’une grande modernité pour son époque, laquelle va en influencer plus d’un après lui. Il a joué un rôle très important dans l’évolution du portrait de groupe. Son travail a été fortement apprécié et admiré, non seulement par ses confrères, mais également par les impressionnistes et les peintres réalistes, bien des siècles plus tard. Manet, Van Gogh, Courbet, Cézanne (le premier et le dernier ayant énormément apprécié sa façon de peindre par petites touches) et bien d’autres n’ont cessé de lui trouver de nombreuses qualités, comme celle par exemple de peindre d’un coup, de façon très instantanée dirons-nous, sans retouche.

 » J’ai surtout admiré les mains de Hals, des mains qui vivaient, mais n’étaient pas terminées  » (Van Gogh va s’enthousiasmer des talents de coloriste de Hals, notamment dans l’emploi du noir,  »en 27 tons différents » précisait-il. Il dira à propos de son travail : c’est aussi beau que du Zola, en plus sain et plu gai, mais aussi proche de la vie« 

Au travers de ses différents tableaux, on peut réellement sentir qu’il a fait preuve d’une maîtrise incroyable, d’une grand justesse oculaire. Sa touche est sûre, rigoureuse, sa main virtuose et habile dans l’art de la gestuelle et du trait des visages. Il y a beaucoup d’expressivité, de lucidité, de réalisme dans le sérieux, le caustique ou le comique. Il traite les visages avec beaucoup de naturel et l’impression générale attrayante amène à dire que ces personnages semblent « vivants« .

Une atmosphère heureuse, spontanée, gaie, pleine de fraîcheur ressort de ses différents portraits. Le sourire, voire même le rire (sous toutes ses formes) le côté malicieux, insouciant, et désinvolte, furent sa marque de fabrique. Lui-même avait, semble t-il, une solide réputation de bon vivant aux frasques multiples.

 » Portrait d’un pêcheur ( ou Homme avec une cruche de bière ) » 1630 Frans HALS
« Portrait de Catarina Hooft et sa nourrice » 1619/1620 – Frans HALS

S’il a eu du succès auprès de celles et ceux qu’il peignait et qui, du coup, le recommandaient à d’autres, c’est très certainement parce qu’il savait mieux que personne capter leur façon d’être et de penser. Il a gagné beaucoup d’argent, mais il en a énormément dépensé. De ce fait, lorsqu’il fut un peu moins demandé et connu, eh bien il se retrouvait couvert de dettes. Il fut même obligé de vendre une grande partie de ses biens pour pouvoir s’acquitter de tout ce qu’il devait. On l’a même dit sans aucune ressource dès 1662.

« Le joueur de Rommelpot » 1618/1622 – Frans HALS

Frans Hals est né à Anvers en 1582 ou 1583. Il a eu un frère, Dirck, qui lui aussi deviendra peintre. Son père était un marchand de draps. Il est encore un tout petit garçon lorsque la famille quitte Anvers (sous la domination espagnole) pour Haarlem où il restera jusqu’à la fin de sa vie.

Il va très vite montrer un grand intérêt pour la peinture et prendra ses premiers cours auprès de Karel Van Mander un peintre maniériste. Pour autant, on ne peut pas dire que ce soit son maître qui ait influencé son travail. Il a beaucoup plus été inspiré et proche de la peinture de Jacob Jordaens par exemple.

Peu de temps avant la trentaine, Hals ouvrira son propre atelier. C’est à cette époque qu’il épouse Anneke Harmendr avec laquelle il aura des enfants mais dont un seul survivra. Elle décède en 1615 en mettant au monde le deuxième. Il se re-mariera en 1617 avec Lsybeth Reyniers qui lui donnera de très nombreux enfants dont certains deviendront peintres comme lui.

Il va très vite faire du portrait sa spécialité et aura une solide réputation en tant que tel. Dans un grand nombre d’entre eux, on ignore l’identité des personnages qui sont peints. Les portraits dits  » de famille «  c’est un souhait des commanditaires. Ils ont vu le jour aux Pays-Bas dans le début du XVIe siècle. On souhaitait immortaliser les différents membres d’une même famille, un peu comme on ne ferait de nos jours avec une photographie. Par ailleurs, c’était aussi une façon de montrer le statut social. Hals a été très apprécié dans ce genre d’exercice, et s’il l’a été ce fut pour son audace, son inventivité, son assurance aussi. Il les peignait dans différents décors : soit dans l’intimité de leur intérieur, soit dans celui d’un extérieur boisé, d’un jardin, ou tout simplement au cours d’une promenade.

 » La famille VAN CAMPEN dans un paysage  » 1623 Frans HALS
 » Enfants de la famille Van Campen avec une voiture tirée par un bouc  » 1623/25 Frans HALS
 » Portrait du mariage de Isaac Massa avec Beatrix Van der Laen  » 1622 env. Frans HALS

Hals a eu de nombreux élèves, des disciples, mais sa technique en a influencé beaucoup après lui. Il est décédé dans le dénuement le plus total en 1666 et fut inhumé en l’église Saint-Bavon qui se trouve sur la place Grote Markt à Haarlem.

Le Mont Saint-Michel …

 »  Le Mont-Saint-Michel est pour la France ce que la grande pyramide est pour l’Egypte. Il faut la préserver de toute mutilation. Il faut que le Mont-Saint-Michel reste une île . Il faut conserver à tout prix cette double œuvre de la nature et de l’art. » (Victor HUGO – Extrait de son discours et prise de position, lors des débats sur le caractère insulaire du Mont-Saint-Michel en 1884)

 » Le plus connu et le plus cité, dès qu’on parle du monument, est sans nul doute Victor Hugo. Le Mont figure dans plusieurs de ses ouvrages, mais également dans sa riche correspondance au fil des années et de ses voyages. Ainsi, dans une lettre datée du 28.6.1836, alors qu’il séjournait à Coutances, dans la Manche, Victor Hugo note :  » à l’extérieur le Mont-Saint-Michel apparaît de huit lieues en terre et quinze en mer, comme une chose sublime, une pyramide merveilleuse dont chaque assise est un rocher énorme façonné par l’océan ou un haut habitacle sculpté par le Moyen-Âge ; et ce bloc monstrueux a pour base, tantôt un désert de sable comme Chéops, tantôt la mer comme le Ténériffe. » Evidemment, tant l’Office du tourisme local que les restaurateurs aiment à rappeler cette comparaison avec les pyramides et quelques-unes des autres belles lignes que Victor Hugo a écrites sur le Mont.

Cependant, Hugo n’a pas été qu’un grand admirateur du site. A l’époque où le Mont servait de prison, il écrivait aussi :  » Si à l’extérieur, il apparaît comme une chose sublime, à l’intérieur le Mont-Saint-Michel est misérable. C’est un village immonde où l’on ne rencontre que des paysans sournois, des soldats ennuyés et un aumônier tel quel. Dans le château, tout est bruit de métiers, des ombres qui gardent des ombres qui travaillent pour gagner vingt-cinq-sous par semaine, des spectres en guenilles qui se meurent dans des pénombres blafardes. Sous les vieux arceaux des moines, l’admirable salle des chevaliers, devenue atelier, où l’on regarde par une lucarne s’agiter des hommes hideux et gris qui ont l’air d’araignées énormes. La nef romane, changée en réfectoire infect, le charmant cloître à ogives transformé en promenoir sordide. Voilà le Mont-Saint-Michel maintenant.  »  Evidemment c’est moins vendeur !.

En 1836, il envoyait aussi la lettre suivante à Louise Bertin :  » en ce moment je suis bloqué par la mer qui entoure le Mont. En hiver, les ouragans, les tempêtes et les naufrages ce doit être horrible. Du reste, c’est admirable. Un lieu étrange que ce Mont-Saint-Michel. Autour de nous, partout, à perte de vue, l’espace infini, l’horizon bleu de la mer, l’horizon vert de la terre, les nuages, l’air, la liberté, les oiseaux envolés à toutes ailes, les vaisseaux à toutes voiles ; et puis, tout à coup, là, dans une crête de vieux murs, au-dessus de nos têtes, à travers les fenêtres grillées, la pâle figure d’un prisonnier. Jamais je n’ai senti plus vivement qu’ici les cruelles antithèses que l’homme fait quelques fois avec la nature. » Pourtant, preuve que ses sentiments pour le lieu étaient ambivalents, comme peuvent l’être les grandes passions, il se rattrapera plus tard, en 1874, dans l’évocation du Mont dans son roman Quatre-vingt-treize :  » derrière lui se dressait, énorme triangle noir, avec sa tiare de cathédrale et sa cuirasse de forteresse, avec ses deux grosses tours du levant, l’une ronde, l’autre carrée, qui aident la montagne à porter le poids de l’église et du village, le Mont-Saint-Michel qui est à l’océan ce que Chéops est au désert. »

 » Le Mont Saint-Michel  » par Flavio BOLA

Hugo n’est pas le seul à avoir écrit sur le Mont. En 1835, l’architecte Viollet Le Duc en parle ainsi dans une lettre adressée à son père :  » Rien n’est plus beau, rien n’est plus sauvage, rien n’est plus grandiose, rien n’est plus triste. Il faut voir ses tours de granit frappées par la mer, il faut entendre le vent pour se faire une idée de l’effet lugubre de cette masse de bâtiments, de son imposante majesté. On ne peut détacher les yeux de ce colosse, il vous fascine, vous poursuit la nuit et ouvre sans cesse devant vos yeux ses longues galeries noires qui semblent les entrées en enfer. »

Autre figure de la littérature à avoir couché le Mont sous sa plume : Gustave Flaubert dans Par les champs et les grèves, un carnet de voyage co-écrit en 1881 avec Maxime Du Camp, l’auteur de Madame Bovary raconte son arrivée au Mont en chaise de poste depuis la ville voisine de Pontorson :  » en face, devant nous, un grand rocher de forme ronde, la base garnie de murailles crénelées, le sommet couronné d’une église, se dresse enfonçant ses tours dans le sable et levant ses clochetons dans l’air. D’énormes contreforts, qui retiennent les flancs de l’édifice, s’appuient sur une pente abrupte d’où déroulent des quartiers de rocs et des bouquets de verdure sauvage. A mi-côte, étagées comme elles le peuvent, quelques maisons , dépassant la ceinture blanche de la muraille et dominée par la masse brune de l’église, clapotent leurs couleurs vives entre ces deux grandes teintes unies. 

 » Le Mont Saint-Michel  » Clarence GAGNON

En voyage dans la région en 1838, Stendhal, lui, est moins impressionné par la merveille. Dans ses Mémoires d’un touriste , il en parle en des termes peu élogieux :  » en faisant à pied la langue montée qui précède les premières maison d’Avranches, j’ai eu une vue complète du Mont-Saint-Michel qui se montrait à gauche dans la mer, fort au-dessous du lieu où j’étais. Il m’a paru si petit, si mesquin que j’ai renoncé à y aller. Ce rocher paraît, sans doute, un pic grandiose aux Normands qui n’ont jamais vu les Alpes ni Gavarnie. » 

En 1850, le nouvelliste Paul Féval publie La Fée des grèves, un roman-feuilleton historique dont l’action se déroule sur le mont, en pleine guerre de cent ans en 1450. Ce premier roman sera suivi, en 1879, d’un second livre consacré, lui, à l’histoire du rocher de 708 au XIXe siècle Les merveilles du Mont-Saint-Michel. En 1861, l’historien Jules Michelet fait allusion au Mont dans La Mer :  » représentez-vous, tout autour, une grande plaine comme des cendres blanches qui est toujours solitaire, sable équivoque dont la fausse douceur est le piège le plus dangereux. C’est et ce n’est pas la terre , c’est et ce n’est pas la mer. Sur un bloc de granit il se dresse, monte et monte encore indéfiniment comme une Babel d’un titanesque entassement, roc après roc, siècle après siècle. » 

Mais le Mont est aussi dans des œuvres plus récentes dont de nombreux polars comme La promesse de l’ange de Frédéric Lenoir, Le sang du temps de Maxim Chattam ou encore Saint-Michel priez pour nous de Jean-Pierre Alaux. Enfin, le Mont-Saint-Michel a aussi été à l’honneur dans des bandes dessinées : d’abord dans un épisode de la Famille Fenouillard de Georges Collomb en 1863, ouis dans les aventures de Lefranc ( L’ouragan de feu de Jacques Martin en 1961). En 1994, on retrouve aussi le célèbre monument dans une aventure des 4 As, sorte de concurrents belge au Club des 5 dans Les 4 As et le fantôme du Mont-Saint-Michel . Autant d’ouvrages qui séduisent autant ceux qui rêvent un jour de voir le Mont, que ceux qui, y étant déjà allés, se replongent dans le plaisir de leur visite.  » Lomig GUILLO (Écrivain,  journaliste français, rédacteur en chef du magazine Management et du magazine Capital – Extrait de son livre Les secrets du Mont-Saint-Michel )

 » Le Mont Saint-Michel  » Charles BENTLEY

P.S. : je citerai aussi Henry De MONTERLANT (Romancier, dramaturge, essayiste français – Extrait de son ouvrage Par monts et par lettres ) :  » ici tout se ligue pour nous ravir et pour nous en imposer : c’est grâce et magnificence, force et subtilité, ampleur et sveltesse. L’on ne sait si l’art a choisi ce lieu de la nature pour son apothéose ou si la nature s’est plus, tentée par la magnificence de l’art, à se parer ici de ses plus grands charmes. Chaque pierre a son passé, chaque pierre crie de génie de l’artisan qui l’a sculptée. Que de surprises ! Que de contemplations ! Que de ravissements ! Comme la mer rythme bien la voix des siècles « 

La calligraphie …

« La calligraphie est l’algèbre de l’âme tracée par l’organe le plus spiritualisé du corps : sa main droite. Elle est la célébration de l’invisible par le visible.  » Michel TOURNIER (Écrivain français – Extrait de son livre La goutte d’or)

 » La calligraphie japonaise ressemble à un souffle. le souffle du dragon. Elle consiste à peindre l’instant avec une force inouïe et une délicatesse extrême.  » Maxence FERMINE (Écrivain français – Extrait de son livre Zen)

En règle générale …

 » En règle générale, la couleur est donc un moyen d’exercer une influence sur l’âme. La couleur est la touche. L’œil est le marteau. L’âme est le piano aux cordes nombreuses. L’artiste est la main qui, par l’usage convenable de telle ou telle touche, met l’âme humaine en vibration. Il est donc clair que l’harmonie des couleurs doit reposer uniquement sur le principe de l’entrée en contact efficace avec l’âme humaine. Cette base sera définie comme le principe de la nécessité absolue.  » Wassily KANKINSKY (Peintre russe naturalisé allemand puis français)

Wassily KANDINSKY 1866/1944

Les tutus courts …

 » Les tutus courts ont certes permis de faire la démonstration d’une excellente technique, mais on privé certains ballet de leur contexte surnaturel. De mon point de vue, la longueur et le volume des jupes ne sont pas seulement une question de mode, mais des données qui découlent logiquement du style de la danse interprétée et remplissent donc une fonction artistique indispensable. » Tamara KARSAVINA (Danseuse Étoile russe)