» Des gamins qui se baignent, ruisselants de la vague et empourprés de grand soleil ; des portraits de femmes, d’une fringante élégance et d’une harmonie riche et simple ; des marines avec ces fameuses voiles que Mr Sorolla gonfle de vent comme pas un ; des foules qui grouillent sur les plages ; des paysans avec leurs bœufs ; ces célèbres bœufs qui stupéfièrent tant de gens ; des portraits encore, et encore des études où la lumière miroite, où l’eau clapote, où le soleil réchauffe et diapre les objets … enfin, tout ce que peut jeter à pleines mains un talent qui ne connait pas les difficultés et une gaieté de peindre qui ne connait pas les arrière-pensées. Voilà le feu d’artifice de Mr Sorolla. On ne discute pas avec un homme qui vous fait voir, d’un coup de poing dans les yeux, comme on dit, trente six chandelles . On se contente de l’éblouissement que vous cause cette prodigalité de luminaires. Avec Mr Sorolla y Bastida à chaque coup on voit les trente-six au grand complet et souvent même, il y en a quelques-unes de supplémentaires. Oui … Mr Sorolla sait peindre les voiles que le vent gonfle, les êtres ruisselants d’eau et de soleil sur les grèves. Il nous a montré cela cent fois, mais toujours avec tant d’habileté que non seulement il n’a pas encore réussi à nous en fatiguer, mais encore avec ces thèmes rebattus, insignifiants, existant à peine, il continue à provoquer en nous l’étonnement de la chose bien faite, de cette peinture qui se tient sur les confis du trompe-l’œil, mais qui évite la banalité par une joie de peindre essentiellement communicative. » Arsène ALEXANDRE (Journaliste, critique d’art, collectionneur, inspecteur général des musées français)

S’il vous reste quelques jours de congés avant la rentrée, ou si durant les deux mois à venir vous êtes de passage dans la région, l’exposition proposée par l’Hôtel de Caumont d’Aix-en-Provence sur Joaquin Sorolla, est réellement à ne pas manquer. Je dis cela parce que, malheureusement, c’est assez rare que la France lui rende hommage. Du coup, il reste un peu méconnu dans notre pays. La dernière fut en 2016 au musée des Impressionnismes de Giverny. Celle-ci s’intitule « Joaquin SOROLLA – Lumières espagnoles » et dure jusqu’au Ier Novembre 2020.
Elle se déroule en un parcours passionnant sur les temps forts de sa carrière et l’influence que certains maîtres du passé ont pu avoir sur lui et d’autres plus contemporains. C’est aussi un parcours qui traverse sa vie personnelle. Le tout donne un beau voyage en Méditerranée, un ensemble très subtil, émouvant, complètement auréolé de la lumière de ses tableaux, éclaboussé de soleil, baigné par une mer souriante .
C’est un peintre qui a été profondément attaché à sa famille, à sa culture espagnole, à la région de sa ville natale : Valence. Il a, de son vivant, reçu de nombreux prix, connu les honneurs, et la richesse, le succès en Europe et le triomphe aux Etats Unis, et pourtant la critique n’a vraiment pas été tendre avec lui le reléguant bien souvent à un peintre folklorique . Il faudra attendre le XIXe siècle pour qu’on le réhabilite de façon tout à fait justifiée. A partir de là, sa peinture a été fortement appréciée.
Joaquin Sorolla c’est pour beaucoup la peinture sur le motif, en extérieur, proche de l’impressionnisme. C’est le travail d’un grand peintre et illustrateur espagnol prolifique, perfectionniste, avec un coup de pinceau lumineux et novateur .Les scènes du bord de mer ont été ses préférées et du reste, ce sont celles qui ont connu le plus de succès. Parmi ses divers sujets on retrouve souvent des pêcheurs, des baigneurs ruisselants d’eau, des femmes se promenant au bord de mer, des bateaux, des moments de repos sous des parasols, des jeux d’enfants sur la plage etc…. sans oublier le jeu des couleurs dans ses vagues, et le vent dans les voiles . S’il a beaucoup favorisé la lumière dans ses tableaux, l’ombre n’en a pas été absente et suscite d’autres sensations picturales.

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Il a été également un excellent portraitiste et avant qu’il ne connaisse les honneurs et le triomphe avec ses scènes en bord de mer, le portrait a été pour lui une grande source d’aisance matérielle dont il disait qu’elle compensait la pauvreté de son enfance . Il a débuté dans ce genre en 1879. Parmi ses différents portraits, il y en a de nombreux de son épouse, de ses enfants et de ses proches.


Tous ces sujets racontent aussi l’histoire des loisirs du peintre et de sa famille qui avaient l’habitude de se rendre chaque été dans des régions du bord de mer en Espagne, mais aussi jusqu’à Biarritz. Une fois sur place, il avait à cœur de planter son chevalet peindre ce qu’il voyait , affirmant souvent que la lumière y était plus belle et plus fine que nulle part ailleurs.

Il fut un inconditionnel de la peinture en plein air. D’ailleurs il n’a jamais caché qu’il n’était pas vraiment attiré par celle en atelier, bien qu’il y fut parfois obligé . De cette préférence, il a tiré une merveilleuse spontanéité, de la fraîcheur, des sensations magnifiques. Il a eu beaucoup de talent pour restituer les transparences et les reflets de l’eau. Ce sont des instants de vie très réalistes, des impressions d’instantanéité, des moments suspendus dans le temps, avec une palette de couleurs éclatantes . Sorolla fut dans la vie de tous les jours un optimiste et cela se sent dans sa peinture.
Il est né à Valence en 1863. A la suite d’une épidémie de choléra, il perd ses deux parents alors qu’il n’a que deux ans. Il sera recueilli, avec sa sœur, par une tante maternelle et son époux. Celui-ci aurait bien voulu le pousser à apprendre son métier de serrurier , mais Joaquin avait une passion et un certain talent pour le dessin. A 16 ans il rentre à l’Académie des Beaux Arts de Valence. Deux ans plus tard il s’installe à Madrid, fréquente le musée du Prado, admire l’œuvre de Vélasquez, Zubaran etc… , puis les grands maîtres du baroque et de la Renaissance italienne lors de son voyage à Rome l’année suivante. En 1883, il reçoit la médaille d’or à l’Exposition régionale de Valence.
En 1888, il épouse Clotilde Garcia, la fille d’un photographe auprès duquel il avait étudié adolescent les techniques de cadrage et d’instantanéité, et qui fut l’un de ses premiers collectionneurs . Elle lui donnera trois enfants. Le couple vivra un certain en Italie, avant de se fixer à Madrid tout simplement parce qu’il savait que la consécration en tant que peintre ne pouvait venir que de la capitale. C’est là qu’il avait commencé d’ailleurs à exposer dès 1881.



Au début, i l va très peindre des portraits, notamment de ses proches, mais aussi des scènes de la vie quotidienne et scènes populaires dans le style du Costumbrismo qui était un courant très en vogue en Espagne dans le passé en peinture mais en littérature aussi. Dans la peinture par exemple , Goya et Murillo en étaient des adeptes . Il s’agissait de reprendre des sujets de type folklorique, costumes régionaux, coutumes, mœurs, et scènes pittoresques locales . C’est pour avoir adopté ce courant qu’il fut critiqué à ses débuts. Il s’en éloignera petit à petit pour se lancer dans un mouvement plus réaliste.

Son optimiste constant, son bonheur familial et le succès vont l’amener à une peinture pleine de clarté, lumineuse. C’est près des rivages maritimes qu’il va trouver tout cet aspect positif qu’il recherche, en regardant les plaisirs de la plage, le travail des pêcheurs, celui de leurs épouses qui recousent les filets, les femmes qui se promènent au bord de l’eau etc….Cette peinture luministe, très avant-gardiste à l’époque, va lui apporter un public, des commandes, et une plus grande popularité. Il sera également chargé d’exécuter des portraits de familles aristocratiques espagnoles, mais surtout du roi Alfonso XIII, de l’infante Isabelle de Bourbon mais aussi du président des Etats Unis William Howard Taft ( il sera convié à la Maison Blanche pour l’exécuter)


Il a beaucoup voyagé pour exposer son travail : Paris, Berlin, Munich, Vienne, Venise, Rome, Buenos Aires etc… jusqu’à ce qu’il reçoive la consécration suprême aux Etats Unis à partir de 1909. Malgré ses très nombreux déplacements, l’Espagne restera chère à son cœur, et il y revient sans cesse. C’est à Madrid qu’il reçoit les marchands d’art, les collectionneurs, mais aussi les peintres de différents pays.
En 1920 un accident vasculaire cérébral le laisse paralysé. Il meurt trois ans plus tard en 1923. Son épouse a légué une grande partie de ses tableaux à l’État espagnol en 1925 respectant ainsi le souhait de son époux qui désirait que ses œuvres ne soient pas dispersées. Elles constituent désormais le fonds du Musée Sorolla qui s’est installé dans sa maison à Madrid. Sorolla l’avait fait construire en 1911. Il y avait un immense atelier et un très beau jardin. C’est là qu’il aimé travailler et ce jusqu’à sa mort.
Le musée a été fermé durant la guerre civile espagnole. Un grand nombre de tableaux a pu être sauvegardés et mis en réserve. Le fonds comprend 1294 peintures et 4000 dessins.


Merci pour nous faire découvrir cet artiste. Je ne le connaissais pas. J’aime beaucoup ses toiles. Bon dimanche Lisa.
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C’est toujours un plaisir pour moi que de pouvoir faire découvrir un artiste. Celui-ci a renommée internationale et pourtant en France il est quelque peu méconnu. Chaque fois qu’une exposition le met à l’honneur j’en suis ravie car sa peinture est pleine de lumière optimiste. Merci d’avoir aimé et belle journée à vous ♥
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Intéressant ! J’aimerais bien voir cette exposition mais Aix est bien loin de ma Touraine. Merci Lisa pour cette superbe présentation !
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Je suis persuadé que vous auriez beaucoup aimé … Merci pour votre commentaire et votre appréciation. Passez un excellent dimanche ♥
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MERCI Lisa pour ce partage passionnant.. Quel talent Joaquin Sorolla, un bonheur de plonger dans son univers de couleur, de douceur et de lumière.
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L’expo est magnifique, le peintre infiniment talentueux. Chacun de ses tableaux nous donnent envie d’y entrer. La lumière éclabousse comme les vagues. C’est merveilleux ! Merci d’avoir aimé , cela me fait très plaisir. Un beau dimanche à vous Evelyne ♥
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Superbe et excellent article, merci beaucoup, je ne connaissais pas du tout ! Tu nous fais découvrir des merveilles, et l’iconographie est somptueuse. Merci, Lisa
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Merci pour ces paroles qui me touchent … Mes passions parlent dans ce blog et je suis heureuse de les partager avec vous toutes et tous, tout comme j’ai plaisir à faire découvrir des artistes. Merci encore et très beau dimanche Mélie ♥
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J’adore Sorolla qui mieux qu’aucun autre a su capter l’instant, la vie dans la lumière…
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Tout à fait ! Instantanéité et lumière sont au cœur de sa peinture. Merci d’avoir aimé ♥
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Il y a quelques annees(3 ou 4) il y a eu une très belle exposition Sorolla a Giverny. Coïncidence : voyage à Valence quelques jours plus tôt.
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Pour y avoir été, je peux confirmer que l’expo de Giverny était, en effet, très intéressante. Dommage que vous n’ayez pu la voir. Peut-être serez-vous à même de voir celle-ci ? Merci pour votre commentaire Miriam et très belle semaine à vous ♥
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Je suis heureux d’être revenu sur ce Blog qui ne souffre d’aucun défaut, tant, la qualité est présente partout à chaque post. Textes et médias sont de qualité.
Cela fait de vous un Talent.
Bonne journée et bonne semaine à vous.
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C’est vraiment très gentil et cela me touche infiniment. Comme je l’ai dit parfois, mon blog est le reflet de ma passion pour l’art quelle que soit sa forme : picturale, sculpturale, littéraire, poétique, la danse, l’architecture, l’histoire etc…. et si mes posts plaisent, alors j’en suis vraiment heureuse. Passez vous aussi une douce et très belle semaine
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Merci pour cet article captivant sur Sorolla, que je connaissais, car il a peint quelques tableaux de Biarritz. Actuellement il y a un article sur le Voocable, espagnol retraçant cette expo à Aix. En tout cas bravo pour cette belle biographie de ce peintre espagnol que j’apprécie beaucoup
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C’est un peintre que j’apprécie également. Ses toiles incroyablement lumineuses sont tellement pleines d’optimisme. Merci pour votre intérêt Corinne et passez un beau Ier septembre ♥
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