» Avec vous ce matin, j’avais pris rendez-vous
à l’heure bleue où l’aurore met la nuit à genoux,
dans un village pas loin au bord de notre histoire,
une halte secrète au creux de ma mémoire.
Quand j’ai poussé la porte, les gonds ont hurlé
tel un cri de souffrance que je n’oublierai jamais
et sous mes pas pesants ont crissé les graviers
comme une déchirure à mon âme écorchée.
Au silence immobile des grands buis torturés,
tels des pans de vie à jamais ébréchés,
j’ai entendu tomber quelques éclats de rêves,
un peu vite emportés par le jour qui se lève.
Un oiseau de faïence, prisonnier de l’ombre,
grelottait de froid au bout de l’allée sombre.
J’ai voulu lui dire j’ai tant d’amour à donner ».
mais hélas on se lasse, ma voix s’est cassée.
Je vous ai laissé un morceau de mon cœur,
quelques miettes de moi imprégnées de bonheur,
juste une offrande posthume, un tout dernier cadeau.
vous ne m’avez pas vue, j’étais incognito. » Annie KUSABIAK-BARBIER ( Écrivain et poétesse – Titre du poème » Incognito » / Extrait de son livre La voyageuse sur le banc)