Le thé …

 » Pour tirer de l’art du thé la plus totale satisfaction, il faut avoir un état d’esprit spécial, identique à ce que les bouddhistes appellent l’éveil. On y parvient lorsque l’on est attentif aux sollicitations des six sens : entendre, sentir, goûter, voir, toucher, et être conscient. Une fois que cela est devenu habituel, il n’est plus nécessaire d’y penser. » John BLOFELD ( Écrivain anglais, spécialiste des religions et philosophies asiatiques / Extrait : Thé et Tao-L’art chinois du thé )

THÉ

Année BEETHOVEN : Septuor pour cordes & vents Op.20 …

( Vidéo : interprétation par les solistes de l’ORCHESTRE  du GEWANDHAUS de LEIPZIG à savoir : Gerhard BOSSE (violon) – Dietmar HALLMAN (alto) – Kurt HILTAWASKY (clarinette) – Waldemar SCHIEBER (cor) – Werner SELTMANN(basson) – Friedeman ERBEN(violoncelle) – Konrad SIEBACK (double-basse)

 » Sortez donc mon Septuor un peu plus promptement … Les masses sont dans l’attente  » aurait ordonné Beethoven à son éditeur. Pas très respectueux en parlant de son public(les masses) mais qu’importe, il ne lui en tiendra pas rigueur. Cette partition sera fortement appréciée et l’une des plus jouées de son vivant, ce que lui, d’ailleurs, ne revendiquait pas vraiment compte tenu du fait que même s’il la jugeait bien écrite, il ne la plaçait pas au-dessus des autres, affirmant il y a beaucoup d’imagination la-dedans, mais peu d’art. Il fallait toutefois qu’il en fut satisfait puisqu’elle sera dédiée à l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche.

Nous sommes en 1799 lorsqu’il commence à l’écrire. Il la terminera un an plus tard. Cette page, qui épouse à la fois la forme ancienne de la Sérénade et du Divertimento, se compose de six mouvements et sept instruments : violon, alto, violoncelle, clarinette, cor, basson, contrebasse. Elle influencera, plus tard, Schubert et Mendelssohn pour leurs Octuors (huit instruments

Avant sa création en public, elle fut interprétée chez le prince Charles-Philippe de Schwarzenberg qui faisait partie des personnalités très en vue de l’aristocratie viennoise. Pour un grand nombre, des mélomanes  qui avaient adopté Beethoven lorsqu’il était à Vienne.

charles Philippe Schwarzenberg
Charles-Philippe de SCHWARZENBERG (Ministre d’État, président du conseil de la guerre, chevalier du Saint-Esprit et de la Toison d’Or)

Elle est virtuose,novatrice, éloquente, à la fois simple, intimiste, mais forte, grande, brillante, avec du caractère, et empreinte de délicatesse et de légèreté.

 

 

La neige au village …

» Lente et calme, en grand silence,
Elle descend, se balance
Et flotte confusément,
Se balance dans le vide,
Voilant sur le ciel livide
L’église au clocher dormant.

Pas un soupir, pas un souffle,
Tout s’étouffe et s’emmitoufle
De silence recouvert…
C’est la paix froide et profonde
Qui se répand sur le monde,
La grande paix de l’hiver.  » Francis YARD ( Poète français )

ARGENTEUIL sous la neige MONET.jpg
Tableau de Claude MONET

Gianni BERENGO-GARDIN

 » Pour moi la photographie c’est raconter et documenter ce que je vois. Je n’ai aucun désir d’être considéré comme un artiste. Les photographies qui m’intéressent sont celles qui racontent une histoire. Quand je photographie j’aime bouger. Je ne dis pas danser comme Cartier-Besson, mais j’essaie aussi de ne pas être visible. Si je dois raconter une histoire, j’essaie toujours de partir de l’extérieur, montrer où est et comment est fait un pays, entrer dans les rues, dans les magasins, dans les rues, les maisons et photographier les objets, les personnes. Le fil conducteur est celui-là. Il s’agit d’un chemin logique, normal et bon pour découvrir un village ou une ville. … Je ne suis pas contre le numérique, mais je ne pense pas que ce support présente de gros avantages. Ce n’est que mon avis personnel. Le numérique a certainement été une révolution, mais comme toutes les révolutions, il y a du bon et du mauvais. Lorsque j’ai travaillé à Venise, j’ai remarqué que tout le monde photographiait et je dirai que tout le monde photographiait mal, par hasard, juste pour faire une photo, y compris les choses les plus stupides ! Il est clair que chacun a pleinement le droit de le faire, car chacun fait ce qu’il veut. La photographie a, à ce moment là, une grande diffusion, mais elle ne conduit pas à grand chose …. Je ne crois pas aux belles photos. Une fois j’ai dit  « quelle belle photographie« .Je commençais tout juste dans ce métier, j’étais très jeune. Je n’arrêtais pas de dire à Ugo Mulas  » comme cette photo est belle  » lorsqu’il me montrait ses clichés. A un certain moment, il m’a dit  » si vous dites encore et répétez toujours que ma photo est belle, je vous chasse.  » J’étais très gêné et je lui ai répondu  » excusez-moi Maestro, mais que dois-je dire pour affirmer que vos photos sont belles ?  » –  » vous devez dire qu’elles sont bonnes  » Moi je pensais que belles ou bonnes c’était plus ou moins la m même chose. « Non m’expliqua t-il, belles sont les photos esthétiquement parfaites, bien composées. Pourtant elles ne disent rien. Une bonne photographie raconte et dit des choses, communiquent quelque chose. La belle photographie communique elle aussi, mais dit des choses inutiles« . Depuis je n’ai plus jamais dit « c’est une belle photo » , mais « c’est une bonne photographie » Gianno BERENGO-GARDIN ( Photographe et photojournaliste italien)

Berengo-Gardin
Gianni BERENGO-GARDIN

BERENGO GARDIN 1

PORTFOLIO MONDO - WORLD PORTFOLIO

Gianni BERENGO GARDIN 5

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BERENGO GARDIN Venise
Cette photo fait partie de son album Monstres à Venise. Tous les clichés devaient être présentés lors d’une exposition dans la Sérénissime, mais elles ne le seront pas car le maire de la ville a annulé  la manifestation et censuré les clichés . Beaucoup de voix se sont élevées pour prendre parti pour le photographe qui souhaitait montrer le danger que représentent ces paquebots pour la cité. »Voilà quelque chose qu’un maire ne doit pas faire, cacher la vérité même si elle n’est pas appréciée » a notamment dit le chanteur Adriano CELENTANO

Gianni Berengo-Gardin est né en 1930. C’est une éminente et importante figure de la photographie non seulement en Italie, mais dans le monde entier. Son travail a fait l’objet d’un grand nombre d’expositions internationales. Il a écrit divers ouvrages sur son art et reçu de nombreux prix pour l’ensemble de sa carrière.Après avoir séjourné dans différentes villes en Italie, il s’est fixé à Milan. C’est là que sa carrière a véritablement commencé.

Ses photos sont empreintes d’un grand humanisme, d’originalité, de subtilité, de sincérité et d’une certaine poésie. Ce sont pour la plupart des témoignages, des petites études sociologiques. Elles font aussi parfois office de reportage et attirent l’attention sur certains sujets comme par exemple celles  prises dans un asile psychiatrique qui ont amené à la discussion et entraîné une série de réformes dans le système de santé en Italie.

BERENGO GARDIN Hopital psychiatrique
Hôpital psychiatrique / Florence 1968

Que ce soit l’Italie ou dans les autres pays dans lesquels il s’est rendu, il a eu à cœur de les montrer sous toutes les facettes, faisant partager la vie quotidienne des habitants, les fêtes, les coutumes, les traditions.

Quand deux cœurs …

 » Quand deux cœurs en s’aimant ont doucement vieilli
Oh ! quel bonheur profond, intime, recueilli !
Amour ! hymen d’en haut ! ô pur lien des âmes !
Il garde ses rayons même en perdant ses flammes.
Ces deux cœurs qu’il a pris jadis n’en font plus qu’un.
Il fait, des souvenirs de leur passé commun,
l’impossibilité de vivre l’un sans l’autre.
– Chérie, n’est-ce pas ? Cette vie est la nôtre !
il a la paix du soir avec l’éclat du jour,
et devient l’amitié tout en restant l’amour !  » Victor HUGO ( Poète , prosateur, dramaturge, dessinateur, intellectuel engagé, français )

 

HUGO AMOUR

Le politique …

« Le politique a la conscience débile ; bon sans honnêteté ; malhonnête à la façon de la femme qui ment, ou de l’enfant qui vole, sans être bien sûr s’il est ou non coupable ; qui met une sorte d’honneur dans le mélange de la bonté et de la faiblesse, qui s’y tient et y place sa vertu ; l’heureux nouveau venu, qui se persuade volontiers que son bonheur fait celui de tout le monde ; qui s’installe dans sa fortune, comme si elle lui était due, mais avec la crainte sourde de n’y être qu’un hôte de passage, et qui par là glisse à la facilité ; l’homme sans profondeur, qui se corrompt même à fleur de peau, sans jamais être corrompu tout à fait,  sans pouvoir l’être, dirais-je ; le bavard éloquent, l’orateur qui trouve son cœur et ses principes sur ses lèvres, au lieu de chercher ses principes dans son cœur ; qui bavarde pour se convaincre autant que pour persuader les autres, et chemin faisant y réussit ; qui ne connaît cet homme ? C’est Roumestan (personnage d’Alphonse Daudet). Combien d’erreurs évitées, si, loin de s’indigner contre lui, on n’oubliait pas de le comprendre. Car cet homme est légion.  » André SUARÈS (Poète, écrivain, essayiste français / Extrait de son livre Oeuvres d’André Suarès-Tome 1 : idées et visions )

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André SUARÉS ( 1868/1948 )

La marquise ARCONATI VISCONTI – Femme libre et mécène d’exception …

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La marquise en 1870 – Cette photo sert d’affiche à l’exposition

«  J’ai fondé ma vie sur cette croyance que les œuvres utilitaires n’étaient pas toutes les plus utiles et que les choses utiles entre toutes, les choses humaines par excellence étaient les Lettres et les Sciences par lesquelles se créé lentement une humanité supérieure.  » La marquise expliquant le but de son mécénat.

 » La fille de Mr Peyrat est une femme d’esprit millionnaire et de plus marquise. Fortune et couronne, elle les a conquises à la force du poignet et elle entend se servir intelligemment de l’une et prodiguer démocratiquement l’autre. On a conté mille aventures, écrit maintes légendes sur la vie de la marquise. Vérité ou mensonge, tout bien compté la marquise n’est pas une femme vulgaire. C’est une femme douée merveilleusement pour la séduction, qui a pris le cœur humain pour instrument et en joue en grande artiste et virtuose accomplie. Elle va certainement occuper à Paris, en raison même de sa personnalité, par le bruit fait depuis longtemps autour de son nom, par les mystères qui l’enveloppent de cette captivante poésie de l’inconnu, et par ses amitiés, une situation dans le monde parisien. C’est par ce côté, toute de vie extérieure, qu’elle appartient à la chronique. …  » Octave MIRBEAU (Écrivain, critique d’art et journaliste français –  Article dans Le Gaulois en 1880)

Je ne sais si, parmi vous, il y en a qui ont déjà entendu parler de cette femme, ou non. Quelle que soit la réponse, j’espère vivement que mon article vous permettra de la re-découvrir ou de la connaître. C’est une chance que le musée des Arts Décoratifs lui rende hommage au travers d’une exposition. Elle s’intitule :

 » La marquise ARCONATI VISCONTI – Femme libre et mécène d’exception «  jusqu’au 15 mars 2020, en partenariat avec la chancellerie des universités de Paris – Une centaine de pièces, issues de ses collections, y sont présentées, ainsi que des photos, des archives, des documents, des objets etc…, des pièces diverses et variées  qui sont d’autant plus intéressantes qu’elles  couvrent  différentes époques : Moyen-Âge, Renaissance, Révolution française et XIXe siècle.

Marie-Louise Peyrat, qui deviendra par son mariage la marquise Arconati Visconti, fut une femme lettrée, intelligente,  passionnée de littérature ( avec une préférence pour Machiavel, Montaigne, Montesquieu, Voltaire, Villon et Rabelais) , un soupçon excentrique, une originale aimant  rouler elle-même ses cigarettes, une érudite qui s’est vraiment intéressée à la culture, à l’art et aux Lettres dès son plus jeune âge. Éprise de liberté, d’indépendance, elle fut une républicaine engagée très proche des politiciens, des universitaires et des intellectuels de son temps, une philanthrope.

En tant que généreux mécène, cette figure de la Belle-Époque surnommée la bonne fée  (par Émile Molinier)  a 1)  soutenu financièrement  l’École des Chartres, le Collège de France, École pratique des hautes études ;  2 ) protégé les musées : musée du Louvre  (Elle  fut membre fondateur de la Société des amis du Louvre  ) , des Arts Décoratifs, et Carnavalet,  en leur faisant don d’œuvres issues de ses collections ; 3)  fut l’une des premières bienfaitrices de l’Université de Paris ; 4 )  a permis la construction de l’Institut de Géographie. Par ailleurs, elle a créé , outre de très nombreux  prix, bourses pour la recherche en médecine et autres subventions diverses , une fondation pour venir en aide aux familles des policiers victimes dans l’exercice de leur profession

Elle a aimé s’entourer de personnes cultivées et ayant un bel esprit. Parmi ses proches ou les personnes ayant fréquenté régulièrement le Salon qu’elle tenait , le mardi et le jeudi, dans son hôtel particulier de la rue Barbet-de-Jouy, et où l’on débattait sur différents sujets, on trouvait : Alphonse PEYRAT ((son père. Un journaliste, homme politique, historien, polémiste. Un père qu’elle a  adoré ) – Jean JAURÉS  (homme politique qu’elle a admiré assez longtemps jusqu’à ce que leurs relations se détériorent en raison de leurs  différences d’opinions politiques avec le temps)   – Alfred DREYFUS  ( ils ont été très amis, elle l’a soutenu sans relâche et ont échangé une très longue correspondance jusqu’en 1923, notamment lors de sa détention.  )  – Victor HUGO  ( ami de son père, ce dernier demandera à l’écrivain d’être le témoin de mariage de sa fille )  – Léon GAMBETTA  ( lui aussi un ami de son père. Le bruit a couru qu’il fut amant de la marquise et qu’il souhaitait l’épouser. Elle a toujours nié cette rumeur ) – Louis LIARD   (recteur de l’Académie de Paris. C’est à lui qu’elle remettra, à deux reprises, des sommes d’argent conséquentes pour l’Université des Sciences et l’Université des Lettres de Paris ) – Louis METMAN ( Conservateur au musée des Arts Décoratifs, collectionneur, un éminent défenseur de l’art et qui fera partie de son cercle d’amis) – Auguste MOLINIER  (Bibliothécaire et historien  – Un défenseur de Dreyfus,  proche de la marquise. En hommage à cet homme elle fondera en 1904 un prix à l’École des Chartres) – Emile MOLINIER ( Conservateur et historien de l’Art )  –  Raoul DUSEIGNEUR ( antiquaire, expert, son compagnon, l’ami fidèle, celui qui sera de bon conseil pour gérer sa fortune. Lorsqu’il décède elle est inconsolable) – Gabriel MONOD ( l’autre ami fidèle, agrégé d’histoire, fondateur de la Revue Historique, celui qui, très probablement, l’a amené à s’intéresser aux grandes écoles et universités ) –Raymond KOECHLIN  (journaliste en politique étrangère et collectionneur )- Paul VITRY (historien de l’art et conservateur au musée du Louvre) – Raymond POINCARÉ et Aristide BRIAND  ( tous deux avocats et hommes d’État français) – sans oublier Georges CLÉMENCEAU (homme d’État français) et Émile COMBES ( un politique français )

Comme vous aurez pu le constater il n’y a pas de nom de femmes. C’est, semble t-il Léon Gambetta qui lui aurait suggéré de n’en inviter aucune !

Par ailleurs, elle fut  une collectionneuse avertie, réunissant,  dès 1890,  des livres précieux, des meubles, des bijoux, des boiseries du Moyen Âge et de la Renaissance ( ses deux époques de prédilection ) , des pièces d’orfèvrerie, de la vaisselle, dont une grande partie sont réunis au sein même de cette exposition. A la mort de son mari, elle a hérité d’une immense fortune, c’est ce qui lui a permis de l’utiliser pour ses collections, mais surtout pour en faire bénéficier l’enseignement, les bibliothèques et l’art au travers de ses généreux dons.

C’est Émile Molinier; qui était alors le conservateur du musée de Cluny,  qui, au départ, fut l’instigateur de son goût pour les collections. Un goût qui s’est, par la suite, amplifié avec celui qui a partagé sa vie : Raoul Duseigneur .

Marquise service à café
 » Service à petit déjeuner  » attribué à Michel-Victor ACIER – Allemagne Manufacture de Meissen vers 1780/1790  en porcelaine – ( Musée des Arts Décoratifs / Paris )

 

Marie Peyrat est née en 1840 à Paris. Elle est la fille d’Alphonse Peyrat, un journaliste proche de Victor Hugo,  rédacteur en chef dans le quotidien La Presse, qui deviendra député à l’Assemblée nationale, puis sénateur. Désireux de vouloir séparer l’église de l’État, on lui doit la paternité de la célèbre phrase que son ami Léon Gambetta reprendra à son compte, dans ses réunions électorales, quelques mois après que Peyrat l’eut prononcée en 1876  :  » Ce qui est redoutable, c’est le parti clérical. Voilà l’ennemi « .

Alphone PEYRAT
Alphonse PEYRAT

Marie a grandi dans un milieu pas très aisé (lors de son mariage elle avouera n’avoir eu pour dot qu’une robe et une paire de chaussures) . Son père lui a inculqué des principes républicains, anti-cléricaux, et des convictions philosophiques, auxquels elles restera fidèle toute sa vie.. C’était une jeune fille intelligente, bavarde, curieuse, s’intéressant à des tas de sujets et engageant des discussions à leur propos avec beaucoup de passion et d’esprit.

C’est en assistant,  en auditeur libre, aux cours  donnés  à l’École des Chartres qu’elle rencontre celui qui deviendra son prince charmant : un érudit, Gianmartino Arconati Visconti, né en France, mais issu d’une très riche famille de Milan. Lui aussi a un père patriote,  très porté sur la politique, ce qui lui vaudra d’être exilé de son pays. Il a donc vécu en Belgique, en France jusqu’à ce qu’il puisse retrouvé sa terre natale en 1840. Apparemment l’exil ne l’avait pas assagi, puisqu’il a participé à l’insurrection de son pays en 1848 .

Gianmartino ARCONATI VISCONTI 2
Gianmartino ARCONATI VISCONTI

Le mariage de Marie et Giammartino a lieu en 1873. Elle a Victor Hugo pour témoin. Malheureusement, leur union ne va pas durer longtemps compte tenu que son époux meurt trois ans plus tard à Florence, d’une fièvre typhoïde  – Elle hérite d’une énorme fortune et de tous ses biens – On note, entre autres : un château en Belgique, un hôtel particulier à Paris, une magnifique villa sur les bords du lac de Côme, sans oublier des résidences à Rome, Florence, Milan, des œuvres d’art et  des comptes bancaires bien remplis.

Elle aurait pu se laisser vivre confortablement, dépensant son argent de façon futile. Mais il n’en sera pas ainsi. Elle va mettre sa fortune au service de l’art, des Lettres, de l’enseignement et poursuivre sa passion des collections à laquelle l’avait initié son mari.

Sur le plan privé, elle va vivre une très belle histoire d’amour avec Raoul Duseigneur qui la conseillera beaucoup sur les acquisitions de tableaux ou objets d’art . Malgré toutes les demandes qu’il aura pu lui faire, et les sentiments forts  qu’elle lui porte, elle revendiquera son indépendance et ne souhaitera pas se marier. Elle sera dévastée lorsqu’elle le perdra en 1916. Selon son souhait, elle repose, tout près de sa tombe,  à Rives-sur-Fure  ( département de l’Isère) et choisira comme épitaphe des vers du poète français François Villon :  » deux étions et n’avions qu’un cœur  » . Elle ne cessera de lui rendre hommage.

MARQUISE et Raoul Duseigneur
La marquise et Raoul DUSEIGNEUR devant la porte de son château en Belgique
M A D
 » Médaillon en onyx et diamants  » – A l’extérieur les initiales de son défunt mari, et à l’intérieur  une photo de Raoul DUSEIGNEUR (Musée des Arts Décoratifs/Paris )

Comme je l’ai dit en début de cet article, elle a tenu un Salon très réputé, dans son hôtel particulier  de la rue Barbet-de-Jouy où elle recevait deux fois par semaine ( le mardi et le jeudi) des personnalités très en vue que ce soit des politiques, des historiens de l’art, des conservateurs de musées, des écrivains, des  bibliothécaires, des agrégés d’histoire, des universitaires, des archéologues, collectionneurs  etc…

Après s’être entouré de tant de monde, elle passera une fin de vie plutôt en retrait, lisant énormément, écoutant des œuvres lyriques ( particulièrement celle de Wagner) – En parlant de lecture, la marquise avait hérité de son mari, d’une bibliothèque riche de plus de 7000 ouvrages ayant appartenu à la famille Arconati Visconti. L’un de ses exécuteurs testamentaires, Gustave Lanson a eu le droit d’en prélevé environ 700 pour l’ École Normale dont il était le directeur. Le reste a été réparti, selon le souhait de la marquise , dans diverses autres bibliothèques en France.

A sa demande, c’est l’Université de Paris qui fut nommé légataire universel, avec la charge de continuer à subventionner la chaire de littérature française du XVIIIe siècle et veiller à ce que l’achèvement de l’Institut d’art se termine dans de bonnes conditions. Elle a fait don au roi Albert de Belgique de son château médiéval de Gaasbeek où elle aimait passer tous ses automnes. Le musée des Arts Décoratifs recevra, en ce qui le concerne, des boiseries, la quasi totalité de ses bijoux ( dont ses alliances de mariage) , et des porcelaines. De plus, dans son testament elle a souhaité faire don à l’État de toutes les œuvres d’art qu’elle possédait dans son hôtel particulier afin qu’elles soient exposées au musée du Louvre.

Marquise Lalique bague feuille 1900
 » Bague René LALIQUE  » vers 1900 ( Musée des Arts Décoratifs )
Marquise 1
 » Broche tête de femme, serpent et aile  » 1897 env. ( Musée des Arts Décoratifs / Paris )
Marquise agrafe Chine Règne de Qianlong 1736 1796 XVIIIe siècle
 » Boucle de ceinture  » datant de l’époque du règne de l’Empereur Qiantong – Chine XVIIIe siècle – ( Musée des Arts Décoratifs )

 

Marquise Desiderio da Settignano 1428 1464 Le Christ et saint Jean-Baptiste enfants Paris musée du Louvre
 » Jésus et Saint Jean-Baptiste enfants  » – Vers 1460 – Marbre de Desiderio Da SETTIGNANO ( Musée du Louvre / Paris
MARQUISE scènes de la vie de la Vierge
 » Scènes de la vie de la Vierge  » Triptyque  – Vers 1315/1335 ( Musée du Louvre / Paris )
Marquise Vierge adorant l'enfant
 » Vierge adorant l’enfant entourée de saint Jean-Baptiste enfant et deux anges  » 1480 env. Francesco BOTTICINI ( Musée du Louvre )

 

Elle est décédée en mai 1923.

«  Dans le champ illimité du bien à faire, elle avait choisi le bien qu’elle voulait faire. Les beaux-arts, l’érudition, la science, plus particulièrement la France et l’Italie de la Renaissance, la France du XVIIIe siècle, voilà les provinces que sa curiosité aimait à parcourir. Elle avait coutume de se dire une étudiante, une chartriste. Sa fine et large culture a fait d’elle la bienfaitrice en quelque sorte professionnelle des musées et universités …  » Gustave LANSON lors de l’enterrement de la marquise.

 

 

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La légèreté …

 » La légèreté elle est partout : dans l’insolente fraîcheur des pluies d’été, sur les ailes d’un livre abandonné au bas d’un lit, dans la rumeur des cloches d’un monastère à l’heure des offices, une rumeur enfantine et vibrante, dans un prénom mille et mille fois murmuré comme on mâche un brin d’herbe, dans la fée d’une lumière au détour d’un virage sur les routes serpentines du Jura, dans la pauvreté tâtonnante des sonates de Schubert, dans la cérémonie de fermer lentement les volets le soir, dans une fine touche de bleu, bleu pale, bleu violet, sur les paupières d’un nouveau-né, dans la douceur d’ouvrir une lettre attendue, en différant une seconde l’instant de la lire, dans le bruit des châtaignes explosant au sol et dans la maladresse d’un chien glissant sur un étang gelé … J’arrête là. La légèreté, vous voyez bien, elle est partout donnée.  » Christian BOBIN (Écrivain et poète français / Extrait de son livre La folle allure )

BOBIN Christian
Christian BOBIN

Le déjeuner du matin …

 » Il a mis le café
Dans la tasse
Il a mis le lait
Dans la tasse de café
Il a mis le sucre
Dans le café au lait
Avec la petite cuillère
Il a tourné
Il a bu le café au lait
Et il a reposé la tasse
Sans me parler

Il a allumé
Une cigarette
Il a fait des ronds
Avec la fumée
Il a mis les cendres
Dans le cendrier
Sans me parler
Sans me regarder

Il s’est levé
Il a mis
Son chapeau sur sa tête
Il a mis son manteau de pluie
Parce qu’il pleuvait
Et il est parti
Sous la pluie
Sans une parole
Sans me regarder

Et moi j’ai pris
Ma tête dans ma main
Et j’ai pleuré  » Jacques PRÉVERT (Poète, scénariste et parolier français – Extrait de son recueil Paroles / 1946 )

WILLIAM MCGREGOR PAXON
Tableau de William MCGREGOR-PAXON

Année BEETHOVEN : Sonate Op.27 n°2 dite  » au clair de lune  » …

BEETHOVEN sonate au clair de lune Première édition à Vienne Couverture de G.GAPPI
Sonate au clair de Lune 1ère édition à Vienne ( couverture )

Comme on peut le lire sur la couverture de la première édition de l’œuvre à Vienne, il s’agissait d’une Sonata quasi una Fantasia ( Sonate presque une Fantaisie ) : cela signifie que Beethoven avait pensé sa Sonate avec les caractéristiques d’une Fantaisie. Ce qui l’a rend d’autant plus étonnante par certains côtés.

Elle fut composée en 1801, sera très appréciée et deviendra célèbre du vivant de Beethoven, ce qui lui déplaisait d’ailleurs car il estimait qu’il en avait écrit bien d’autres tout aussi intéressantes et belles, qui seraient susceptibles d’attirer l’attention et de plaire.

Le titre donné à cette partition  » au clair de lune  » fut une idée du poète et critique musical allemand Ludwig Rellstab qui voyait en elle une promenade en barque sur le lac des Quatre Cantons en Suisse. Les éditeurs ravis par cette image retiendront l’intitulé.

Ludwig RELLSTAB
Ludwig RELLSTAB

Elle dégage une belle palette d’émotions et sensations diverses et variées, passant d’un premier mouvement grave, solennel, triste, voire même quasi funeste, à un autre très charmant, charmeur, malicieux, gracieux. Le final, quant à lui, est intense, puissant et virtuose.

( Vidéo : Claudio ARRAU au piano )

( Vidéo : J’ai eu envie de mettre également Alfred BRENDEL parce qu’il a fait un très bel enregistrement des Sonates de Beethoven, dont celle-ci. Il interprète le 3e mouvement de celle-ci)

Elle est dédiée à la comtesse Giulietta Giucciardi qui fut son élève en 1801. Ils se plaisent et tombent amoureux. Il est heureux et se confie à son fidèle ami Franz Gerhard  Wegeler :  » ma vie est de plus en plus agréable. J’ai retrouvé mon énergie et sors à nouveau. Tu sais quelle désolation, quelle tristesse ma vie a été ces deux dernières années et ce changement a été provoqué par une fille douce et enchanteresse qui m’aime et que j’aime. Après deux ans, j’apprécie de nouveau quelques moments de bonheur et c’est la première fois que je pense que le mariage pourrait me rendre heureux. Malheureusement, elle n’est pas de ma classe sociale et je ne pourrai certainement pas l’épouser « . Il avait vu juste …  Le père de la jeune fille va, en effet,  s’opposer à une éventuelle union car c’est une famille assez aisée et Beethoven n’a ni rang ni fortune. Par ailleurs, il trouve son caractère bien trop emporté et ses problèmes de surdité n’augurent, à ses yeux, rien de bon pour l’avenir de sa fille.  Elle se fiancera, puis se mariera  au Comte Wenzel Robert Von Gallenberg, un compositeur de musique de ballet.

BEETHOVEN Giulietta Giucciardi
Giulietta GIUCCIARDI