Trois nouvelles Étoiles …

«  J’ai effectué trois nominations en très peu de temps pour envoyer un message aux danseurs, jeunes ou moins jeunes, grands ou petits, et leur faire comprendre l’importance d’être dans le travail. Il reste désormais trois postes à pourvoir pour les hommes et deux pour les femmes, et d’autres encore dans les deux ans à venir.  » José MARTINEZ (Directeur de la danse à l’Opéra de Paris depuis 2022, après le départ de Aurélie DUPONT )

C’est sur la proposition qu’il a faite à Alexander NEEF, directeur général de l’Opéra de Paris, qu’ont été consacrées Étoiles en ce mois de mars :

Hannah O’NEILL 30 ans : merveilleuse danseuse néo-zélandaise, entrée dans le corps de ballet de l’Opéra de Paris en 2011. Au fil des années elle a gravi les échelons : Coryphée, Sujet, Première danseuse et a été couronnée par des prix prestigieux comme le Benois de la danse, la médaille d’or au Concours Varna, et le Prix Lausanne.

 » Ma nomination a été une surprise totale. J’avais moins de frustration lorsque j’était plus jeune, mais j’en rêvais depuis tellement longtemps !  » H.O.N

Marc MOREAU 36 ans : sa nomination tardive fait réellement plaisir parce que c’est un danseur talentueux, accompli, très attaché à l’Opéra de Paris. Il est entré à l’école de danse française en 1999, puis dans le corps de ballet en 2004. Il a patienté, voyant passer devant lui d’autres danseurs, pas forcément meilleurs que lui d’ailleurs, mais c’est comme ça. Il a gravi tranquillement les échelons, fut récompensé, entre temps, par le prix Arop de la danse, et finalement, après tant d’années, il reçoit le titre en même temps que Hannah O’Neill, tous deux dans une chorégraphie de George Balanchine Ballet Impérial.

 » Je n’y croyais plus trop et commençais à me faire une raison. Mais devenir Étoile est l’objectif d’une vie de danseur et je conservais cette idée dans un petit coin de ma tête. Je me suis mis beaucoup de pression pour atteindre cet objectif. Je me sens heureux et soulagé. «  M.M.

José MARTINEZ – Marc MOREAU – Hannah O’NEILL – et Alexander NEEF

Guillaume DIOP 23 ans : entré en 2012 à l’École de danse de l’Opéra de Paris, puis dans le corps de ballet six ans plus tard à l’âge de 18 ans. On lui confiera très vite des rôles masculins importants dans différents ballets classique : Don Quichotte – La Bayadère – Le lac des cygnes – Roméo et Juliette notamment. Il innove d’une part en recevant le titre suprême (à Séoul avec le ballet Giselle) sans avoir gravi préalablement l’échelon Premier danseur (ce qui est très rare dans l’institution française) , et en devenant le premier danseur métis qui entre dans la compagnie de ballet de l’Opéra de Paris :

« Je ne me projetais pas comme danseur mais comme médecin . Mes parents non plus car ils pensaient qu’un garçon métis n’avait pas sa place à l’Opéra  » G.D.

Guillaume DIOP

Fleur du printemps : la Primevère …

  » Une jeune fille est passée sous ma fenêtre. Elle vendait des primevères. J’en ai acheté de grosses bottes, je les ai délivrées de leurs liens si serrés et je les ai laissées s’étirer, se détendre les pauvres petites, dans une coupe bleu ciel où l’on met des primevères chaque année. En me penchant sur elles, j’ai vu leurs visages pâles et las me regarder de cet air perplexe et inquiet qu’ont parfois les petits enfants. On eut dit que le printemps était entré dans ma chambre, chantant très bas, tout bas …  » Katherine MANSFIELD (Écrivaine et poétesse anglaise

primevères

La primevère fait partie de la famille des primulacées ( genre primula : terme venant de primulus signifiant tout premier  ). Elle arrive avec le printemps et les oiseaux qui chantent. En effet, on dit qu’elle est la fleur du coucou car elle le fait chanter dès les premiers jours du renouveau printanier.

On les trouve, sauvages, dans les prairies, les sous-bois, au bord de l’eau également, car elles aiment les endroits humides, mais elles se cultivent  et ornent magnifiquement bien les massifs, les potées et les jardinières des balcons.

On compte environ 400 variétés de primevères. Elles offrent un spectacle magnifique grâce à l’harmonie de leurs différentes couleurs  : blanc, bleu, rose, orange, jaune, prune, parme, violet, rouge. On note un intérêt pour cette fleur au XVe siècle avec le botaniste flamand, fondateur de l’horticulture : Jules Charles de L’Écluse ou de Lécluse)   qui en fit pousser dans les jardins. La Primula auricula (oreille d’ours)  est l’une de ses œuvres et la préférée de nombreux fleuristes pour leurs compositions florales. Son travail a permis à de nombreux horticulteurs ( notamment anglais ) de créer les premiers hybrides de cette fleur.

Jules Charles de L’Écluse dit en romain CLAUDIUS CLUSIUS
primevère oreille d'ours
Primevère oreille d’ours

Comme beaucoup de fleurs, la primevère a sa légende : on raconte que l’apôtre Saint Pierre devint le gardien du paradis à la mort de Jésus. Les clés de la porte étaient attachées à sa ceinture. Un jour qu’il dormait profondément, le trousseau tomba sur terre et les clés s’enfoncèrent dans le sol. On vit alors éclore une multitude de primevères d’un jaune éclatant  .

Une autre légende, venue de Norvège, relie cette fleur à Freyja, déesse de l’amour, de la sexualité, des plaisirs charnels et du bonheur. C’est une des raisons pour laquelle on l’a souvent qualifiée de fleur du libertinage. En Irlande, on les appelle fleur des fées car ces dernières les cueillaient pour en faire des philtres d’amour. La primevère  a  fleuri, par ailleurs,  les fêtes de fiançailles et mariages. Tout comme il arrivait que l’on glisse une fleur de primevère sous son corsage pour aller à un rendez-vous.

Les primevères ont un délicieux parfum . Elles furent autrefois utilisées pour faire des potages , et viennent apporter, de nos jours, dans les salades,  une touche de couleur et un petit goût sucré. En dehors de cela, la primevère dite officinale (sauvage)  a souvent été reconnue pour ses vertus médicinales.

PRIMEVERE officinale
Primevère sauvage

Sous Louis XV,  ses tisanes étaient préconisées contre le bégaiement. Quelques siècles plus tard, on la recommandait pour les douleurs rhumatismales, puis pour lutter contre la toux de la coqueluche ou de la bronchite, l’asthme et les allergies . Elle a, par ailleurs, des vertus sédatives : ses fleurs sont souvent utilisées contre le stress et le sommeil de l’enfant. Diurétiques, elles soignent aussi fort bien les infections urinaires.

De nos jours, on reconnait aux racines de cette fleur  des vertus intéressantes, similaires à celles de l’arnica pour lutter contre les ecchymoses, hématomes et coups. Ce qui est très intéressant compte tenu du fait que l’arnica se fait rare !

Son  langage des fleurs peut avoir différentes significations . D’une manière générale , elle symbolise  les émois des premiers désirs. Mais elle peut être offerte également pour symboliser une marque de tendresse.

 » Fleurs de primevère  » George DUNLOP LESLIE

20 mars 2023 : c’est le printemps !

 » Quand le printemps, de son léger soupir,

Fait naître, dans nos champs, la fleur à demi-close ;

Quand, par un doux baiser, il colore la rose ;

Quand le gazon commence à reverdir ;

Quand l’hirondelle a repris son ouvrage,

Et que le rossignol gazouille son doux chant,

 J’aime à me reposer sous quelque arbre géant,

 J’aime à rêver sous son jeune feuillage.

 Cette eau limpide aux détours gracieux

 coule en frémissant sur un lit de verdure,

Le suave parfum de la jeune nature,

Tout ravit l’âme et rend le cœur heureux.

Mais, ô printemps ! que tu sembles frivole

 Sur nos sens enivrés tu règnes un instant ;

Comme toi, le bonheur, passager, inconstant,

Aujourd’hui nous sourit et demain… il s’envole !  » Félix Gabriel MARCHAND (Écrivain, poète, journaliste, homme politique québécois. Poème extrait du livre La littérature canadienne de 1850 à 1860 Tome II )

Photo : AIKEN House & Gardens

La cuisine et les cinq sens …

 » Qui est cuisinier ne peut l’être que par la mobilisation de ses cinq sens. Un mets doit être un régal pour le regard, l’odorat, le goût bien sur, mais aussi le toucher qui oriente le choix du chef et joue un rôle dans la fête gastronomique. Il est vrai que l’ouïe semble un peu en retrait de la valse, mais manger ne se fait pas en silence, dans le vacarme non plus. Tout son qui interfère avec la dégustation y participe, ou la contrarie, de telle sorte que le repas est résolument kinesthésique.  » Muriel BARBERY (Romancière française – Extrait de son livre Une gourmandise)

L’expérience littéraire …

« L’expérience littéraire panse la blessure, sans porter atteinte au privilège, de l’individualité. Il y a des émotions de masse qui guérissent la blessure ; mais ils détruisent le privilège. En eux, nos moi séparés sont regroupés et nous retombons dans la sous-individualité. Mais en lisant de la grande littérature je deviens mille hommes et pourtant je reste moi-même. Comme le ciel nocturne dans le poème grec, je vois avec une myriade d’yeux, mais c’est toujours moi qui vois. Ici, comme dans le culte, dans l’amour, dans l’action morale et dans la connaissance, je me dépasse ; et je ne suis jamais plus moi-même que lorsque je le suis. Ceux d’entre nous qui ont été de vrais lecteurs , toute leur vie, réalisent rarement pleinement l’énorme extension de notre être que nous devons aux auteurs. L’homme qui se contente de n’être que lui-même est en prison. » Clive Staples LEWIS dit C.S. LEWIS (Universitaire et écrivain britannique – Extrait de son livre Une vie à écrire – La joie de voir de nouveaux mondes à travers les yeux des autres)

C.S.LEWIS 1898/1963

Touche de la main …

« Touche de la main le ciel.

Nettoie les étoiles poussiéreuses.

Monte sur la plus haute branche. Et chante.

De ta main recouvre la ville.

Peins les ténèbres en vert. Ou en orange.

Bois l’eau de la mer jusqu’à la dernière goutte.

Fais plier la vie comme les lutteurs de foire

plient les barres de fer sur les places.

Recommence l’univers du début , d’abord avec argile et boue.

Traverse le même fleuve deux fois.

Change le fer en feu. La neige en pierre.

Dis-moi que rien n’est impossible.

Dis-moi que rien n’est impossible.  » Nassos VAYENAS (Poète grec, traducteur – Ce poème fait partie d’un livre écrit par Michel VOLKOVITCH ( Écrivain, professeur d’anglais, traducteur grec et essayiste français) et qui s’intitule : Les poètes grecs du 21e siècle)

Nassos VAYENAS  » Je vois dans tout poème une fleur délicate qui a pour aliment ce qu’il faut de tristesse et que toute fureur détruit avec rudesse… »

La Réception … James TISSOT

 » L’œuvre de James Tissot (1836/1902) est célèbre pour ses représentations fidèles de la mode de l’époque et ses qualités énigmatiques. Né à Nantes, Tissot partit pour Paris à l’âge de 20 ans. Les artistes et les écrivains qu’il y rencontra exercèrent une immense influence sur sa carrière et sur son style. Il était particulièrement redevable à James Abbott McNeil Whistler dont il s’inspira énormément.

Ce tableau est aussi intitulé L’Ambitieuse , titre à double sens amusant : le sourire de cette femme est-il sincère ou diplomate ? Est-elle là comme personnage principal ou comme la belle compagne de l’homme dont elle tient le bras ? Peut-on lire quelque indice au sein de la foule en train de bavarder, voire de comploter ? Grâce à l’intérêt qu’éprouvait Tissot pour la mode, ses œuvres étaient recherchées par les collectionneurs, même si les critiques les appréciaient moins.

En 1871, ayant participé à la Commune, il dut s’enfuir à Londres. Son œuvre fut aussi apprécié en Angleterre qu’elle l’avait été en France, et il exposa régulièrement à la Royal Academy. Il demeura à Londres jusqu’en 1882, lorsque la mort tragiquement prématurée de sa maîtresse et modèle, Kathleen, qui souffrait de tuberculose, l’incita à retourner à Paris.

Sa convention religieuse, à la fin des années 1880, marqua une nouvelle étape dans sa carrière. Se dédiant désormais aux scènes religieuses, il se rendit au Moyen-Orient où il réalisa de nombreuses études pour des illustrations de la Bible. » Lucinda HAWKSLEY (Historienne de l’art, conférencière et auteure anglaise )

 » La Réception  » 1883/85 James TISSOT (Albright-Knox Art Gallery / Buffalo (Etats-Unis)

Si on laisse …

« Si on laisse la peur guider nos gestes, ils resteront maladroits et douloureux. Mais si on permet au lien qui nous unit, l’amour, l’amitié, de mener la danse, on trouvera facilement l’accord qui se passe de mots, l’harmonie qui devient valse ou tango. S’approcher pour consoler, c’est dire « apprends moi à danser« . Anne-Dauphine JULLIAND ( Essayiste française / Extrait de son livre Consolation)

 » Les Arts florissants  » H/487… Marc-Antoine CHARPENTIER

 » Les Arts florissants  » est un opéra de Chambre en cinq scènes , ou pour reprendre les propos du compositeur Une idylle en musique « , écrit en 1605 à l’attention de la duchesse de Guise, Marie de Lorraine.

Ce n’est pas le plus grand des opéras de ce compositeur , mais il est charmant et traite de beaux sentiments et de valeurs humaines importantes. C’est une œuvre qui nécessite des voix vocalement talentueuses . Bien sur, la danse y avait gracieusement sa place comme c’était le cas à l’époque.

Les personnages sont des allégories représentant la Musique, l’Architecture, la Poésie et la Peinture, des arts appréciés par Louis XIV . Entre elles, il y a deux symboles : celui de la paix et celui de la discorde. C’est le premier qui triomphera du second avec l’aide des arts. La paix c’était bien sur le roi , lui seul pouvait être celui qui la ramène.

Au travers de son œuvre, Charpentier a tenu à rendre hommage à ce roi dont il était apprécié , ce qui, soit dit entre nous, ne fut pas chose facile pour le compositeur quand on sait combien Lully a tenu une place importante , avant lui, à la Cour auprès du roi Soleil.

(Vidéo :  » Ouverture  » – Interprété par l’Ensemble LES ARTS FLORISSANTS – Direction William CHRISTIE )
(Vidéo : Scène I  » Que mes divins concerts  » (la Musique) – Interprété par Agnès MELLON – Elle est accompagnée par William CHRISTIE à la direction de son Ensemble LES ARTS FLORISSANTS )